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Impact de la guerre sur les finances publiques : La RDC et le FMI s’accordent pour un programme FEC réajusté

Impact de la guerre sur les finances publiques : La RDC et le FMI s’accordent pour un programme FEC réajusté

Dans un contexte national complexe, suite à la crise sécuritaire persistante dans sa partie orientale, la République Démocratique du Congo vient de franchir une étape significative sur le front économique. Une délégation du Fonds Monétaire International (FMI), conduite par Calixte Ahokpossi, chef de mission pour la RDC, a conclu, le 13 mai 2025, un accord préliminaire au niveau des services avec les autorités congolaises. Cet accord porte sur la première revue du programme économique et financier triennal soutenu par la Facilité Elargie de Crédit (FEC). Une nouvelle qui, bien que soumise à l'approbation finale de la direction et du conseil d'administration du FMI prévue pour fin juin 2025, insuffle un optimisme prudent.

Les discussions, qui se sont tenues à Kinshasa du 30 avril au 13 mai, ont été l'occasion pour le FMI de saluer les efforts de coordination entre le Ministère des Finances, le Ministère du Budget et la Banque Centrale du Congo. Une synergie qui, selon l'institution de Bretton Woods, a permis de stabiliser l'économie nationale en dépit des vents contraires. Le Ministre des Finances, Doudou Fwamba, qui a présidé une réunion clé de la Troïka politique élargie à la mission du FMI le 12 mai, a d’ailleurs réaffirmé la ferme volonté du gouvernement de respecter ses engagements et d'ouvrir la voie à un soutien budgétaire accru.

L'un des signaux les plus encourageants est sans doute la maîtrise de l'inflation. Pour la première fois depuis juillet 2022, le taux d'inflation en glissement annuel est repassé sous la barre des 10% en avril 2025. Une performance notable, attribuée à la stabilité du taux de change observé depuis mi-2024 et à un resserrement judicieux de la politique monétaire.

Sur le plan de la croissance, l'économie congolaise a fait preuve d'une résilience remarquable. Le Produit Intérieur Brut (PIB) a enregistré une croissance robuste de 6,5% en 2024, et les projections pour 2025 tablent sur un dynamisme soutenu, supérieur à 5%, principalement tiré par le secteur extractif. La stabilité extérieure s'est également renforcée, grâce à l'accumulation continue de réserves internationales et à une réduction du déficit du compte courant, bien que des efforts restent à fournir pour atteindre le niveau d'adéquation recommandé de couverture des importations.

Cependant, ce tableau positif est assombri par l'escalade du conflit armé dans l'Est du pays. L'intensification des hostilités, particulièrement dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, a engendré une crise humanitaire, sociale et économique profonde, coûtant la vie à des milliers de personnes.

Cette situation a inévitablement exercé une pression considérable sur les finances publiques. L'année 2024 a été marquée par des dépassements des dépenses publiques, dû à une forte augmentation des dépenses exceptionnelles de sécurité, des investissements publics et des transferts aux provinces et entités publiques. Malgré une bonne collecte des recettes, le déficit budgétaire intérieur a dépassé le plafond programmé.

Pour 2025, les défis persistent. La fermeture des bureaux de perception des recettes dans les zones occupées, conjugué à l'exonération de la TVA et des droits de douane sur les produits alimentaires de base, engendre un manque à gagner significatif. Simultanément, les pressions sur les dépenses se sont accrues, notamment avec le maintien de dépenses de sécurité élevées et le doublement des salaires des militaires et policiers depuis mars, une mesure destinée à soutenir le moral des troupes.

Face à ces réalités, le gouvernement congolais a réaffirmé son engagement envers les objectifs du programme FEC, qui a été recalibré. L'objectif est de préserver la viabilité budgétaire tout en dégageant une marge de manœuvre suffisante pour répondre aux besoins urgents en matière de sécurité et d'aide humanitaire, sans sacrifier les dépenses sociales prioritaires et les investissements publics, d'autant plus que l'aide humanitaire extérieure est en partie suspendue.

Pour y parvenir, des mesures compensatoires sont prévues : accroître la collecte des recettes, rationaliser les dépenses non prioritaires – y compris par une réduction du train de vie de l'État – et un projet de loi de finances rectificative pour 2025 sera soumis au Parlement. Un appui concessionnel supplémentaire de la Banque mondiale est également attendu, et le FMI encourage d'autres partenaires au développement à apporter leur soutien.

Sur le front des réformes structurelles, des progrès notables ont été réalisés. La modernisation de la gestion des finances publiques (GFP) avance, avec un cadre juridique renforcé pour une meilleure adhésion à la chaîne de dépenses. L'opérationnalisation de la Direction générale du Trésor (DGTCP), la déconcentration graduelle de l'ordonnancement des dépenses, la mise en place du compte unique du Trésor (CUT) et la transition vers un cadre budgétaire hors ressources extractives sont autant d'avancées significatives.

Le FMI insiste sur la nécessité d'intensifier la mobilisation des recettes intérieures, notamment via le déploiement du système de facturation normalisée de la TVA, la rationalisation des exonérations fiscales et une lutte accrue contre l'évasion fiscale et la fraude douanière. Une meilleure efficacité des dépenses publiques et des avancées en matière de transparence et de gouvernance, surtout dans le secteur extractif, sont également jugées capitales pour assainir l'environnement des affaires et combattre la corruption.

Enfin, la mission du FMI a encouragé les autorités à poursuivre la mise en œuvre des réformes liées à la Facilité pour la résilience et la durabilité (FSR). Ces mesures, dont les échéances approchent, visent à renforcer la résilience de la RDC face aux chocs climatiques et à consolider son rôle de pays solution dans la transition énergétique mondiale.

Au terme de cette mission, M. Ahokpossi a tenu à remercier l'ensemble des parties prenantes congolaises pour leur hospitalité et la qualité des échanges. Si le chemin vers une stabilité économique et sociale durable reste semé d'embûches, cet accord préliminaire avec le FMI constitue une reconnaissance des efforts engagés et un encouragement à poursuivre sur la voie des réformes, dans l'intérêt du peuple congolais.

Nathan Mundele

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