Révolution de la conscience révoltée (15) : L’Alliance des Traîtres
Par Jonas Tshiombela
Avocat du peuple
Kinshasa, 27 mai 2022. Par un étrange retournement d’histoire, ceux qui hier s'accusaient de crimes, de trahison ou d’incompétence se retrouvent aujourd’hui côte à côte, unis non pas par l’amour du Congo, mais par la peur de perdre définitivement leur pouvoir, leur influence et leur accès aux privilèges. Kabila, Nangaa, Katumbi, Diongo, Fayulu, Sessanga : autant de noms qui, à des époques différentes, ont promis au peuple justice et renouveau, mais qui aujourd’hui semblent tous prêts à pactiser avec l’impardonnable.
Le bal des incohérences
En 2012, Joseph Kabila faisait appel à la nation pour résister aux rebelles du M23, accusés à juste titre d’être les marionnettes du Rwanda. Aujourd’hui, c’est auprès de ces mêmes milices que l’ancien président trouve un corridor de retour, accueilli à Goma comme un héros par ceux qui l’avaient combattu militairement. Une alliance contre-nature, validée par Paul Kagame, l’homme dont les ambitions régionales ont toujours saigné l’est du Congo.
Pendant ce temps, Corneille Nangaa, jadis président de la CENI, qui défendait bec et ongles les résultats des élections de 2018, affirme aujourd’hui qu’ils étaient truqués. Il s’auto-désigne donc menteur et faussaire. Mais loin de se retirer honteusement, il appelle à une transition politique… avec lui aux commandes ! Il serait risible si ce n’était aussi tragique.
La normalisation de la trahison
Comment expliquer que Moïse Katumbi, autrefois fer de lance de l’opposition contre Kabila, tolère que son porte-parole célèbre le retour de ce dernier sans broncher ? Où sont les principes qui faisaient de lui une alternative crédible ? Le silence de Katumbi n’est pas neutre. Il est complice.
Même Franck Diongo, qui a payé au prix fort son opposition à Kabila emprisonné, humilié, jugé dans son lit d’hôpital se montre désormais proche de Corneille Nangaa, fidèle parmi les fidèles de l’ancien régime. Une gifle à sa propre histoire.
Et que dire de Martin Fayulu, qui s’était érigé en icône du suffrage volé, et de Delly Sessanga, promoteur de la rigueur constitutionnelle ? Tous deux multiplient les signes de rapprochement avec des figures qu’ils ont jadis combattues. Pour quel idéal ? Aucun. Pour une place à la table des négociations, quitte à trahir leur propre électorat.
Une opposition en décomposition
Ce que nous vivons n’est pas une recomposition politique. C’est une implosion morale. Une course effrénée à la récupération, où les principes sont piétinés au profit de stratégies d’alignement opportunistes. Le mot "opposition" ne signifie plus rien. C’est devenu un refuge pour les déçus du pouvoir, pas un sanctuaire pour les défenseurs du peuple.
Le peuple doit trancher
Il est temps que le peuple congolais sorte de la sidération. Il n’existe pas de retour glorieux pour ceux qui ont trahi hier, encore moins pour ceux qui les rejoignent aujourd’hui. Ceux qui pactisent avec Kabila, Nangaa, ou les M23, pactisent avec la misère, le sang, le pillage et la souffrance du peuple congolais.
Il ne peut y avoir de pardon sans justice
Le pardon sans mémoire est une complicité. La réconciliation sans vérité est une mascarade. Et le Congo n’a plus de temps pour les masques. Wait and see.
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