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Pressions et sanctions sévères contre le RwandaRDC : Tshisekedi invite Macron à passer aux actes !

Pressions et sanctions sévères contre le RwandaRDC : Tshisekedi invite Macron à passer aux actes !

Il était houleux. Au-delà de la traditionnelle conférence de presse, c’est fut là, en direct sur les antennes de la Radiotélévision Nationale Congolaise, un véritable débat contradictoire entre Félix Tshisekedi, Président de la RD. Congo, et Emmanuel Macron, Président Français, dans le cadre de son premier séjour en terre congolaise.


Retour de la paix
Dans la mêlée, le Chef de l’Etat congolais, rétorquant aux allégations de son hôte, a martelé sur la nécessité pour la France d’exercer une pression sur le Rwanda en vue de sonner les glas de la cessation du soutien aux rebelles du M23 et de la fin des hostilités à l’Est de la RDC.
Pour Félix Tshisekedi, les annonces du Président Français, en introduction de son discours, sont certes satisfaisantes, mais souffrent d’un caractère théorique. Prônant un changement radical de paradigme, il a plaidé en ces termes : « Il faut apporter plutôt une aide au retour et non aide à demeurer dans cette situation. Je demande que la France mette aussi la pression », a lâché Tshisekedi.
Rejet du compromis à l’africaine
Salué par un soutien vif de nombreux officiels dans la salle où s’est tenue ladite conférence de presse, Félix Tshisekedi n’a pas hésité, un seul instant, de répliquer aux propos de son homologue au sujet du compromis à l’africaine stipulée par Jean-Yves Le Drian, ancien Ministre des Affaires étrangères française. « Je faisais allusion aux propos de Yves Le Drian. Lui, il est officiel français. Le compromis à l’africaine n’est pas de la journaliste », a-t-il réagi.
Effort national dans le secteur du numérique
Quelques heures après, sur la tribune du Forum Economique de Kinshasa, le Chef de l’Etat a présenté les réalisations de la RDC dans la chaîne d’actions liée à l’utilisation de nouvelles technologies et du numérique. « En ce qui concerne la chaîne d’actions liée à l’utilisation de nouvelles technologies et du numérique comme outil-support dans la définition de sa stratégie, la République Démocratique du Congo s’est distinguée par l’exécution, dans un temps record, des réalisations suivantes : la définition d’une vision du Numérique portée par le Plan National du Numérique Horizon 2025 ; la création d’une Agence pour le Développement du Numérique ; la définition d’un cadre institutionnel et de gouvernance par la promulgation en 2020 de la Loi relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication, et bientôt d’un Code du Numérique», s’est-il exprimé.
Ces réalisations vont de pair avec la nécessité d’assurer le développement des infrastructures numériques ainsi que des contenus numériques à offrir à la population, notamment.
La Pros.

 

Conférence de presse du Président de la République et de M. Félix Tshisekedi, Président de la République Démocratique du Congo
Kinshasa, le samedi 04 mars 2023
Propos liminaires
Emmanuel Macron : Monsieur le Président, cher Félix, Monsieur le Premier Ministre, Mesdames et Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Ambassadeurs, chers amis. D'abord, je veux dire combien je suis heureux d'être aujourd'hui pour ma première visite en République Démocratique du Congo, dans cette salle historique pour l'Histoire de votre nation et après avoir accueilli comme invité d'honneur le Président, au Forum sur la paix en 2019, puis retrouvé lors du Sommet sur le financement des économies en 2021.
Il était grand temps que je vienne à mon tour. Alors cette visite est la dernière étape, le point d'orgue, en quelque sorte, d'une tournée de 4 jours qui m'a conduit de Libreville à Luanda, puis Brazzaville, jusqu'à vous, Kinshasa. Et c'est ici, en effet, que se jouent nombre de combats du siècle, y compris ceux que nous avons portés ces derniers jours.
Celui pour la forêt et ce trésor du bassin du fleuve Congo. Alors, cette visite, vous l'évoquez à l'instant, arrive à un moment particulier pour la République démocratique du Congo et j'en mesure toute la gravité. Elle intervient à un moment, vous l'avez dit, Président, où une région, un peuple, un pays vit le nouvel acte d'une tragédie qui, depuis près de 30 ans, ne s'est jamais vraiment éteinte.
Des centaines de milliers de Congolais vivent, revivent le cauchemar de la guerre, de la fuite, du dénuement absolu. Une ville, Goma, est à nouveau sous la menace d'une rébellion qui emprunte de nouveaux acronymes.
Aujourd'hui, le M23, dont le visage et les soutiens extérieurs et l'agenda sont connus. La France ne s'est jamais résignée à une soi-disant fatalité de l'Histoire et à ce que l'horreur de la guerre puisse se répéter.
Parce que la guerre qui revient, c'est ajouter des morts aux morts et des drames aux drames. Et en disant cela aujourd'hui, je veux également pleinement mesurer le poids de l'Histoire : les drames qui se sont joués dans votre pays, les crises et guerres précédentes qui nécessitent et nécessiteront que la justice pour le temps présent et la justice pour les crimes passés puissent passer.
Face à une Histoire dont le nombre de victimes équivaut à celui des guerres mondiales que nous avons vécu, la France ne prétend pas - et je ne prétends pas - avoir seule une solution. La solution est dans un réveil collectif, dans la prise de conscience qui se joue ici, qui est l'affaire de tous et de toute la région. Et aux crimes et aux tragédies qui se déroulent sous nos yeux, nous ne devons pas ajouter l'oubli et l'abandon.
Alors je souhaite aujourd'hui que la France reste fidèle à son rôle d'allié indéfectible de la RDC pour défendre son intégrité et sa souveraineté. La République démocratique du Congo ne doit pas être un butin de guerre. Le pillage à ciel ouvert de la République démocratique du Congo doit cesser. Ni pillage, ni balkanisation, ni guerre.
C'est le sens même de ma présence aujourd'hui, dire à tous qu'il ne peut d'ailleurs y avoir deux poids : deux mesures entre la tragédie qui se joue en Ukraine sur le territoire européen et celle qui se joue sur le sol africain. Et la solidarité ne saurait être à géométrie variable.
A cet égard, je veux vous saluer, Monsieur le Président, pour la clarté de vos expressions et de vos votes à l'Assemblée Générale des Nations Unies, quand il s'est agi de condamner l'agression russe et de défendre le droit international. Vous méritez la même clarté.
Nous avons, au cours des derniers jours, écouté les acteurs humanitaires congolais et internationaux engagés sur le terrain. C'est la première réponse de court terme. Nous avons entendu leurs alarmes face au dramatique manque de moyens qui se profilent sur le terrain, les situations extrêmes qui sont à la fois à nouveau vécues par nombre de vos compatriotes.
C'est pour cette raison que la France sera le premier Etat à répondre à l'initiative de l'Union européenne, annoncée ce matin même. Initiative qui permettra de mettre en place un pont aérien humanitaire à destination de Goma. Nous allons débloquer une contribution immédiate de 34 millions d'euros d'aide humanitaire, laquelle s'ajoutera au montant de près de 50 millions annoncé par l'Union européenne.
Nous nous tenons également à la disposition de l'Union européenne pour fournir des moyens de transport civils ou militaires et pour procéder à leur acheminement. Je veux ici remercier le commissaire européen LENARCIC, d'avoir amorcé cette solidarité européenne qui se concrétisera dans les jours qui viennent par l'acheminement de plusieurs tonnes de matériel humanitaire au profit des populations déplacées dans la région de Goma et dans toutes les régions qui ont été affectées par ces mouvements rebelles et ces groupes terroristes.
Le rôle de la France, c'est aussi de tout faire pour qu'il y ait un chemin vers la paix. Pour cela, chacun doit être à la hauteur de ses responsabilités. J'ai parlé il y a quelques instants au secrétaire général des Nations unies, Antonio GUTERRES, qui est engagé pour faire jouer aux Nations unies leur rôle indispensable.
Je l'en remercie. Ensemble, nous devons travailler, Union européenne, Union africaine, Organisations sous-régionales, pays de la région et Nations unies.
Nous devons travailler à ce que chacun apporte sa contribution pour enfin imposer la désescalade et la paix.
A cet égard, je veux ici dire tout notre soutien au processus de Luanda et de Nairobi. Et suite à la dernière réunion qui s'est tenue en marge du sommet de l'Union africaine, à Addis-Abeba, notre soutien à la médiation que vous avez confié. J'étais hier avec le Président LOURENÇO, nous avons eu un très long échange sur le sujet.
Le plan qui est aujourd'hui sur la table, qui a été agréé par tous, qui est en train d'être mis en œuvre, j'en suis convaincu, est le bon, à condition évidemment qu'à chaque étape il soit respecté et que le chronogramme qui a été décidé à partir du 28 février soit dûment respecté.
Cessez-le-feu sur le terrain, mécanisme de vérification sous supervision angolaise, cantonnement du M23 sur votre sol, processus de désengagement, désarmement et réinsertion, déploiement de forces régionales.
Je veux ici remercier les Kényans, et j'espère que les autres rejoindront. Je veux ici dire que nous serons évidemment mobilisés pour aider au financement et à la désescalade dans un premier temps pour parvenir à un retour à une paix durable ensuite.
Tout cela est ce qui nous a longtemps manqué. Mais tout cela dépend évidemment des pressions politiques, diplomatiques et économiques pour que cela soit respecté.
A cet égard, la discussion que j'ai eue avec le Président LOURENÇO, la discussion que j'ai eu ce matin avec le Président, cher Félix, et l'échange que j'ai pu avoir avec le Président KAGAMÉ m’a démontré une chose. Tous m'ont apporté un soutien clair au cessez-le-feu pour mardi prochain, qui est prévu dans le chronogramme, sur lequel se sont engagés aussi les représentants du M23 qui sont allés voir le Président LOURENÇO.
Nous verrons maintenant si chacun respecte la parole donnée. Mais si je dois retenir un seul motif d'optimisme, c'est que tous mes interlocuteurs adhèrent à ce plan porté par l'Angola, le Kenya, le Burundi, et je salue, cher Félix, le courage qui est le vôtre de donner une chance à ce plan et à la paix.
Avec une exigence légitime : que tout ce qui s'y engage respecte la parole donnée, les rendez-vous, les dates et l'effectivité des choix pris et des promesses tenues. Il nous revient d'être collectivement à vos côtés pour faire la démonstration que ce choix est le bon. Ceux qui s'en éloigneront auront une responsabilité écrasante et s'exposeront à la sanction de l'Histoire.
Et dans une région où la France a su regarder en face son propre passé, nous savons combien ce poids de la sanction de l'Histoire peut être accablant. Je le disais en ouverture de mon propos, cette visite en un moment de gravité est aussi une visite d'amitié, d'espoir.
Le Président l'a évoqué à l'instant. C'est un espoir légitime parce que vous êtes un grand pays et nos deux pays ont en quelque sorte en commun aussi de voir grand. Et pour transposer un mot célèbre du Général De Gaulle : « Le Congo ne peut être le Congo sans la grandeur ». Aucun pays d'Afrique n'est plus doté que le vôtre de richesses de toutes sortes et une capacité à saisir un destin d'exception.
C'est pourquoi nous souhaitons bâtir un partenariat nouveau sur plusieurs axes. D'abord, vous aider à la pleine souveraineté sur le plan sécuritaire et militaire. Nous sommes déjà les premiers partenaires en termes de formation militaire de la RDC. Nous souhaitons faire davantage parce que la condition pour qu'il y ait dans la durée la fin des pillages, la fin du risque de balkanisation que j'évoquais c'est qu'il y ait le retour de l'Etat régalien et des conditions de cet Etat régalien partout sur le territoire.
Nous souhaitons être des partenaires dans la durée de ce travail : formation, équipement. La capacité d’être à vos côtés correspond au nouveau partenariat qui est le nôtre.
Deuxièmement, c'est sur le terrain économique. Nous allons cet après-midi dans une conférence économique illustrer ce que je disais lundi. Nous répondons aux demandes qui sont les vôtres. On ne vient pas plaquer des solutions, on vient avec des entreprises de toutes tailles, de tous ordres et beaucoup d'entreprises nouvelles. Nous assumons d'être là, y compris pour défendre nos intérêts économiques.
On le fait en amenant avec nous toutes les compétences, et y compris les Européens. Je me félicite que deux commissaires européens seront à nos côtés cet après-midi. Ce n'est pas simplement la France mais la France et l'Europe, sur la base d'un partenariat équilibré et respectueux.
On l’évoquait ensemble, ces entreprises proviennent du secteur numérique jusqu’au domaine minier, dans lesquels nous souhaitons travailler avec vous pour bâtir un cadre de confiance qui permettra une exploitation au service des Congolais.
Ceci, dans les meilleures conditions scientifiques, permettant justement la coopération et notre expertise. C'est je crois là la clé de ce partenariat économique parce que l'Afrique est un théâtre de compétition. Il faut que cette compétition se fasse dans un cadre loyal qui serve les intérêts des populations, qui aident à lutter contre la corruption, mais où nous avons notre place à jouer, ni plus ni moins.
Ensuite, la science et la recherche. J'aurai cet après-midi l'occasion et l'honneur d'être reçus par le professeur MUYEMBE, découvreur du virus Ebola dans ce fleuron de la recherche scientifique congolaise et africaine qui est l'Institut national de recherche biomédicale. Je veux ici d'ailleurs rappeler combien la France a été engagée dans cette lutte contre le virus Ebola avec les meilleures équipes de l'Inserm et de plusieurs de nos laboratoires.
Combien de nos chercheurs et de nos épidémiologistes sont venus. Yves LEVY avait eu cette mission confiée il y a quelques années ici même et je veux saluer cette coopération mais l’INRB, dans le séquençage des virus les plus dangereux dans la lutte contre la pandémie de Covid 19, dans la formation d'étudiants venus de toute l'Afrique, prouve tout ce qu'on peut accomplir quand notre coopération se donne les moyens.
Sur ce modèle qui est un fleuron de la coopération franco-congolaise, je souhaite qu'on aille beaucoup plus loin avec la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, pour illustrer cette volonté dans de nombreux domaines d'échanges scientifiques et universitaires. Je souhaite aussi que nous puissions le faire dans les domaines climatiques et liés à la biodiversité, notamment autour de la question des forêts si importantes et que vous avez réévoqué.
Enfin, voir les choses en grand, c'est le voir aussi pour la culture congolaise. C'est votre puissance, il faut l'exercer, c'est votre intérêt, c'est le nôtre d'avoir en Afrique et dans le monde, si je puis dire, l'équivalent d'un Nigeria francophone. Les créateurs et entrepreneurs qui nous accompagnent avec les ministres amènent avec eux, outre un immense intérêt pour leurs homologues congolais, tous les outils et les réseaux pour l'aider à se développer dans nombre de domaines nouveaux : jeux vidéo, séries télévisées, bande dessinée, e-sport, univers virtuel.
De nombreux domaines où la créativité, le génie congolais a sa place à jouer. Sa vocation, permettre des moyens d'expression et de partage pour nos jeunesses. Des moyens aussi de création et de développement de nos industries culturelles et créatives qui sont extrêmement importantes. Et dans ce cadre, je veux ici dire combien, à mes yeux, la langue française n'est pas simplement un trait d'union, mais un trésor en partage dont vous êtes devenu le centre de gravité. Plusieurs présidents de la République sont venus avant moi ici pour parler de francophonie.
Et lorsque François MITTERRAND s'est rendu à Kinshasa en 1984 parler de francophonie, il la défendait ici alors la France était deux fois plus peuplée que votre pays. Je viens ici devant vous en vous parlant de francophonie et en assumant totalement que vous êtes le premier pays francophone par votre démographie. C'est une force et une fierté dont il faut tirer toutes les conséquences. C’est une communauté de langue, de valeurs, de solidarité, de progrès, d'exigence.
C'est aussi une communauté de création, de dynamisme. Je suis convaincu que la vocation qui et celle de la République démocratique du Congo est de prendre toute cette place, la première dans la francophonie de demain. Je souhaite qu'ensemble, on puisse bâtir les prochains rendez-vous et en particulier des annonces fortes lors du Sommet de la Francophonie que nous organiseront en France en 2024. Merci beaucoup.
Questions réponses
Journaliste : Monsieur le Président, la mémoire congolaise retient d'une façon fraîche que la France a joué un rôle pertinent dans le génocide rwandais et surtout dans l'entrée des FDLR en RDC avec l'opération Turquoise. Vous vous rappelez, il y a eu un couloir humanitaire, on a fait entrer des militaires avec armes et munitions, malgré l'opposition de l’autorité congolaise. Aujourd'hui, la RDC a déjà enregistré plus de 10 millions de morts. On est victime de notre solidarité. Comment la France compte-t-elle résoudre personnellement, puisque vous étiez là et c'est vous qui avez fait entrer ces militaires, ces problèmes, cette problématique de la sécurité dans l'Est ? Et comment comptez-vous réparer le préjudice causé à la population congolaise ? Puisque tous les rapports des Nations Unies, des experts des Nations Unies, Amnesty International et autres attestent la thèse d'une agression rwandaise sous couvert du M23. Nous constatons que la France n'est pas assez chaude à condamner le Rwanda, à demander des sanctions puisque vous siéger au Conseil de sécurité des Nations unies, mais vous le faites avec agressivité contre la Russie. Pourquoi cette léthargie du côté congolais ? Vous sentez-vous plus coupable de la mort de 800 000 Rwandais plutôt que de 10 millions de Congolais ? Qui plus est, vous avez même donné 20 millions de dollars au Rwanda, pays agresseur à la RDC. La RDC peut-elle toujours continuer à considérer la France comme un pays ami ? Merci Monsieur le Président.
Emmanuel Macron : Merci pour vos questions. J'ai dit dans mon propos introductif et je vous le redis avec beaucoup de clarté, que la France était un allié de la RDC et continuera de l'être. Et j'ai dit avec beaucoup de clarté comment nous voyons la situation aujourd'hui, condamnant toutes formes de pillage, de balkanisation, de menace de la souveraineté de votre pays. Je suis prêt à ouvrir tous les dossiers de l'Histoire, je l'ai fait avec le Rwanda.
Si c'est le souhait du Président TSHISEKEDI, je suis totalement favorable à ce qu'il y ait une commission d'historiens qui puisse assigner les responsabilités aux uns et aux autres. Vous avez rappelé une page sombre de l'Histoire de la région. La France a assumé d'ouvrir tous ces livres et de la faire écrire par des historiens de manière totalement indépendante.
Je pense que vous avez fait un raccourci qui, lui, n'a rien d'historique, ni de juste entre le rôle qu'a pu jouer la France et la situation dramatique que j'évoquais, et la guerre, la deuxième guerre avec les millions de morts dans votre pays dont je rappelle la gravité. Donc je récuse le raccourci que vous avez fait et la responsabilité qu'on pourrait assigner à la France parce que je suis pour la vérité, mais toute la vérité, et je ne suis pas pour prendre tous les fardeaux.
J'essaie de prendre les miens et c'est déjà bien. Donc oui, pour une commission d'historiens, pour faire ce travail s’il vous semble utile, s’il semble utile au Président et donner les faits. Ensuite, soyons clairs, quelle est la situation depuis 1994 ? Plusieurs pays de la sous-région, il n'y en a pas qu'un, plusieurs, sont rentrés dans votre pays et plusieurs groupes rebelles y ont prospéré, captant d'ailleurs beaucoup de richesses minières et économiques qui devraient revenir à votre peuple.
Et depuis 1994, ce n'est pas la faute de la France, pardon de le dire dans des termes aussi crus, vous n'avez pas été capable de restaurer la souveraineté, ni militaire, ni sécuritaire, ni administrative de votre pays, c'est aussi une réalité. Il ne faut pas chercher des coupables à l'extérieur de cette affaire. Et donc, on en est dans cette situation qui a conduit à des drames absolus, à cette deuxième guerre, à des millions de morts qu'on ne doit pas oublier, à la nécessité aussi, ce qui est une responsabilité qui doit se faire ici.
Ce n’est pas à la France ou d’autres de le faire, de mettre en place une vraie justice, une justice transitionnelle qui est la clé pour que celles et ceux qui parfois ont tué soient jugés. Comment voulez-vous qu'il y ait une paix durable et de la confiance dans un pays quand la justice n'est pas passée ?
N'accusez pas la France pour quelque chose qui dépend de vous. Mais très clairement, cette situation, depuis 30 ans, a pris un tour inacceptable. Et si on est clair, soyons clairs jusqu'au bout, et assignons toutes les responsabilités, y compris les responsabilités congolaises, y compris les responsabilités de la sous-région.
Bâtissez une armée solide, construisez la sécurité et le retour de l'Etat partout sur le territoire, faites passer la justice transitionnelle pour que vous n'ayez pas des coupables et des criminels de guerre encore en responsabilité ou sur le terrain, soyez intraitables avec tous les voisins de la région quand ils viennent vous piller et nous serons à vos côtés.
Je ne peux pas être plus clair sur ce sujet. La clé dans la durée, on l’a évoquée avec le Président TSHISEKEDI, c'est très clairement d'avoir la capacité de tenir tout le territoire et un discours de vérité avec toute la sous-région, parce qu'on ne peut pas rester sur un modèle économique qui consiste à ce que des ressources soient prises ici pour permettre la stabilité économique de voisinage.
A ça s'ajoute un devoir aussi, qui est de répondre à la menace terroriste, je l'évoquais tout à l'heure rapidement. Les ADF sont des groupes, eux, qui n'ont pas de proxys régionaux. Ce sont des groupes terroristes sur votre sol qui menacent la stabilité et qui peuvent s'étendre. On l'a vu dans d'autres régions africaines, avec des conséquences terribles. Et ces mouvements terroristes islamistes, il faut aussi les combattre.
C'est une question de sécurité nationale. Ensuite, pour ce qui est du M23 et des sanctions, j'ai toujours été très clair et la France a constamment condamné le M23 et tous ceux qui le soutiennent. Et je suis ici pour que chacun prenne ses responsabilités, y compris le Rwanda. Aujourd'hui, la Région assume ses responsabilités en mettant un plan de désescalade sur la table. Il en est à ses premiers pas.
D’abord, il y marque une convergence entre des mécanismes qui étaient séparés jusqu'alors. Ensuite, il commence à fonctionner. En tout cas, je le regarde avec beaucoup d'estime, de d'amitié et si je puis dire de soutien. Nous sommes d'accord, y compris avec le Président TSHISEKEDI pour appliquer ce plan et donner une chance à la paix. Donc nous avons une opportunité de résoudre, je l'espère, la question du M23.
Nous avons aussi l'opportunité de traiter ce faisant si ce plan avec son chronogramme sont appliqués. Donc je vais être très clair, ce n'est pas aujourd'hui qu'on doit tout bousculer. Aujourd'hui, il faut donner une chance à ce plan, à la médiation angolaise, à l'engagement des uns et des autres résultats.
On verra sur le terrain ceux qui feront obstacle à ce plan puisque dans le cadre de la médiation il y a un mécanisme de vérification sous pilotage angolais qui pourra dire qui respecte, qui ne le respecte pas - avec des observateurs indépendants. Ceux qui feront obstacle à ce plan savent à quoi ils s'exposent, y compris à des sanctions.
Journaliste : Monsieur le Président MACRON, vous êtes aujourd'hui à Kinshasa, dans un pays qui se prépare à une échéance électorale importante à la fin de l'année. Craignez-vous comme un de vos ministres des Affaires étrangères a pu le formuler dans le passé qu'il y ait de nouveaux compromis à l'africaine pour la prochaine élection à venir, comme cela avait été formulé lors de l'annonce de la victoire de Monsieur TSHISEKEDI ? Monsieur MACRON, vous avez beaucoup insisté durant votre tournée sur la fin de la Françafrique. Votre visite hier à Brazzaville et les images du Président Français aux côtés de son homologue Sassou NGUESSO ont été interprétées par beaucoup comme une forme de reliquat du passé. Est-ce qu'à ce jour, on peut dire que la réalité impose de peut-être garder certaines pratiques du passé ?
Emmanuel Macron : Alors je veux d'abord dire très clairement que j'ai expliqué la position de la France. Nous avons pris des engagements humanitaires et politiques très clairs, y compris d'ailleurs sécuritaires. Mais ce n'est pas la France qui apportera la solution, et je le dis ici avec beaucoup de clarté et d'humilité. Je pense que c'est à la fois l'honnêteté et c'est la condition pour pouvoir être heureux. Puisque si on attend trop de quelqu'un, ou si on arrive dans le sentiment qu'on pourrait résoudre tous les problèmes, on finit tous malheureux.
Ensuite, je l'ai dit au Président, moi, je soutiens le processus. Je fais confiance aussi à l'engagement du Président LOURENÇO et j'espère, en quelque sorte, ne pas avoir à aller jusqu'aux sanctions parce que ça voudra dire que le chemin aura été respecté. Je pense que tous ici, dans cette salle, c'est ce que vous préférez parce que c'est ça qui permet d'éviter la guerre et de recouvrer une situation de stabilité.
Enfin, sur les questions humanitaires, je voudrais distinguer deux choses. Il y a le pont humanitaire qu'on a décidé, qu'on va financer de court terme. Il faut le faire parce que c'est livrer du matériel médical et de quoi se nourrir dans une situation d'urgence.
Ensuite, il y a la question de réfugiés et de déplacés, et je souscris à ce qui a été dit par le Président, et nous accompagnerons ce mouvement sur le retour de ces populations vers des lieux qui auront été libérés par les M23. Le Président m’a aussi parlé d'autres camps de réfugiés, cette fois-ci côté rwandais. Sur ce qui est des élections à venir, il y a un calendrier, il y a un engagement.
La France a toujours été très claire, c’est-à-dire, là aussi, je pense que si on veut que les choses marchent, il faut partir avec de la confiance et se donner les moyens.
Et donc il y a un processus loyal qui est une commission nationale indépendante qui suit le processus, avec des personnalités incontestables d'un point de vue politique et neutres, avec des systèmes d'enregistrement et d'organisation de vote aux meilleurs standards.
Avec des observateurs régionaux, internationaux déployés partout, avec peut-être d'ailleurs une association des communautés religieuses pour que, de manière très locale, il puisse y avoir des observations dans chaque bureau de vote et qu'il y ait un processus de confiance qui soit mise en place. Donc moi, j'ai confiance en cela, je sais combien le Président TSHISEKEDI, qui est le fruit d'une alternance politique, est attaché à la clarté démocratique.
Il n'y a aucune raison pour que les choses ne se passent pas dans les meilleures conditions. Et le rôle de la communauté internationale, c'est d’y aider en fournissant les moyens, la bonne organisation et le reste.
Pour ce qui est de la Françafrique dont vous avez parlé et de la fin de la Françafrique. Je ne suis pas sûr qu'on soit dans le meilleur pays pour en parler, ce n’est pas une façon de nous défausser, mais c'est une réalité là aussi. Mais qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire qu'on assume tout et qu'on parle d'un nouveau pas.
Le président Sassou NGUESSO est Président depuis longtemps dans son pays. Ce n'est pas le choix de la France. Ça fait 14 ans qu'il n'y a pas eu un Président français qui était là-bas et c'est normal que ce ne soit pas le choix de la France parce qu'il se trouve qu'il n'est pas Président français.
Donc quand on va au Congo-Brazzaville - parce qu'il faut humilier personne quand on fait une tournée régionale - ça ne me choque pas particulièrement que le Président français rencontre le président du Congo. Après la question c'est qu'est-ce qu'on lui dit ? Ce n'est pas pour lui servir la soupe.
Et donc j'ai tenu un discours cohérent avec ce que je vous disais lundi, qui est celui de bâtir de nouveaux partenariats, une politique pour le climat et la forêt, qui correspond à nos ambitions et l'application de ce qu'on a lancé à Libreville.
Également une politique culturelle nouvelle en défendant justement les artistes, y compris les plus insolents et les plus innovants.
De nouveaux partenariats en matière économique pour les petites et moyennes entreprises pour faire davantage là-bas et améliorer le cadre d'affaires, ce que je lui ai demandé parce qu'il n'est pas bon aujourd'hui.
Donc, c'est une politique exigeante, sincère, d'avenir. Voilà. Mais si on se met en quelque sorte dans une situation qui consiste à dire : « partout où il y a des dirigeants qui ne sont pas élus aux meilleurs standards démocratiques ou ceux qui nous plaisent ou qui sont là depuis trop longtemps, il n'y a plus de déploiement de la France ni de ce partenariat », vous serez les premiers à m'expliquer le lendemain qu’il n'y a plus de politique ni de présence de la France. Donc on fait avec les dirigeants qui sont là, avec respect.
On le doit à la fois au président Sassou NGUESSO et à son peuple. On le fait en constatant nos accords et nos désaccords et en essayant de bâtir une politique d'avenir et en disant ce qui ne va pas quand ça ne va pas, ce que j'ai fait hier. Donc je pense que c'est cohérent. Mais cette exigence, c’est exactement ce que nous sommes en train de faire, avec le continent africain.
Je pense qu'il le mérite parce que c'est un immense continent d'avenir avec lequel on a une Histoire plurielle, si je peux utiliser ce terme, multiple. C’est un continent que j’aime.
Commentaire du Président TSHISEKEDI.
Emmanuel Macro : Malgré les vivats, si le Président TSHISEKEDI m’y autorise, je voudrais apporter un commentaire. D'abord, je veux que vous sachiez que quand il y a des problèmes électoraux aux États-Unis d'Amérique ou en France, la presse française en parle. Elle les dénonce, elle l'explique, elle s'en saisit et elle en parle de manière aussi intraitable qu'elle le fait quand elle parle de vous.
Donc, il n'y a pas de double standard. Ce qui serait inquiétant, c'est si la presse française n'en parlait pas pour vous. Mais elle en parle aussi pour nous.
Elle parle de malversations quand il y en a. Elle essaie de dire la vérité, c'est le travail d'une presse indépendante. Et donc, il ne faut pas être choqué que la presse quand elle entend des oppositions qui disent qu'il y a des problèmes. Ce serait un double standard si elle disait : on est en Afrique, donc on ne pose même pas la question. Ce n'est pas un sujet. Elle pose la question, mais elle le fait aussi chez nous, chez nous.
Et il se trouve que chez nous, quand il y a des malversations politiques, je ne voudrais pas que des malentendus s'installent, y compris quand on fait référence au Président CHIRAC, il y a des procès qui sont faits et les gens sont condamnés parce qu'il y a une justice indépendante. Donc, il y a une presse indépendante et une justice indépendante. Ça crée une démocratie qui est parfois vibrante.
Alors, je ne dis pas qu’on se fait attaquer, mais c'est très bien. Ça permet les alternances démocratiques et ça permet de bâtir une parfaite maïeutique, une vérité. Ça, c'est la première chose. Ne croyez pas qu'il y a un double standard, ce n'est pas vrai. Ne croyez pas que ce soit de l'irrespect. Ce n'est pas vrai parce que les journalistes français, européens ou américains posent les mêmes questions à leurs dirigeants chez eux.
La deuxième chose, et ça me permet d'insister parce que le président a parlé de la France en répondant à la question.
Journaliste : En décembre dernier, la secrétaire d'État, Chrysoula ZACHAROPOULOU a ouvertement condamné, au nom de la France, le soutien apporté par le Rwanda au M23. 3 mois plus tard, qu'est-ce qui fait que, au plus haut niveau, vous n'arrivez toujours pas à le faire ? Pourquoi ? Monsieur le Président. Pourquoi le mot « agression » est considéré comme un mot tabou ? Votre homologue juste à côté l’a prononcé 6 fois, j'ai compté. Pourquoi avez-vous du mal à nommer la question rwandaise alors que tous les rapports indépendants le disent ? Et les pauvres ? Vous avez tout à l'heure parlé des discours de vérité.
Emmanuel Macron : J’ai été très clair sur la condamnation du M23 et de tous ceux qui le soutiennent, y compris le Rwanda. Donc je ne peux pas être plus clair que ça. Après, ce n'est pas une question de dénonciation. Je l'ai fait, nous l'avons fait depuis des mois. Parler d'agression, on l'a fait par des groupes qui sont d'ailleurs des groupes incluant aussi des Congolais, vous le savez comme moi. Donc ce n'est pas une agression d'une puissance extérieure.
Ils sont soutenus par plusieurs puissances extérieures dans une logique de prédation. Mais ces groupes ont aussi des ressortissants qui sont de votre pays, c'est une réalité. Bon. Donc je l'ai condamné et on peut parler tout à fait d'agression, je n'ai aucun problème de tous ces groupes, y compris des ADF et autres. Et la France est un soutien et un allié de la RDC contre à la fois ces pillages, cette volonté de balkanisation.
La question qu'il y a derrière ce que vous me demandez, c'est de savoir si on veut passer un cran supplémentaire et aller tout de suite aux sanctions. J'ai répondu de manière très claire tout à l'heure. Nous dénonçons, nous condamnons, nous accompagnons le processus de médiation régionale, mais au moment où, pour la première fois depuis des mois, alors que jusqu'alors, ces processus avaient été mis en échec par des refus de délivrer des visas pour permettre, par exemple au M23 de bouger, ça a été fait, ils ont pu aller à Luanda. Il y a un processus qui avance.
On a un rendez-vous mardi. Je serai intempestif à vous dire : il faut tout de suite sanctionner. Je vous l'ai dit, moi, je fais confiance à ce processus parce que je pense qu'on peut se faire plaisir, on peut faire de l'escalade de tribunes ici, devant vous. Mais demain, c'est quoi l'alternative au plan de paix régional ? C'est la guerre.
Est-ce que je souhaite la guerre ? Non. Donc je souhaite défendre ce plan de paix régional qui me paraît sérieux, crédible et qui engage toutes les forces de la région. Parce que je n'ai pas trouvé de solution plus intelligente et plus crédible. Et donc, dans ce cadre, je préfère faire confiance avec exigence, dire ce que nous attendons du Rwanda et des autres voisins, c'est de s'engager et de respecter les rendez-vous qu'ils se donnent sous la supervision des médiateurs.
Et s'ils ne respectent pas, alors oui, il doit y avoir des sanctions. Je vous le dis très clairement, mais au bon moment et en fonction du processus qui a été décidé par votre président et ses homologues à Addis-Abeba et qui est sous cette médiation congolaise.
Journaliste : La question s'adresse au Président français. Monsieur MACRON, après plusieurs jours en Afrique, vous rentrez demain matin en France. Le pays, mardi, pourrait être bloqué en raison de la réforme des retraites. Alors est-ce que vous ne redoutez pas que le blocage s'installe ? Et puis, si la réforme devait rester très impopulaire, est-ce que vous ne craignez pas que l'on vous reproche de ne pas être à l'écoute des Français ?
Emmanuel Macron : Vous comprendrez bien que j'ai déjà fait plusieurs commentaires sur cette réforme des retraites qui a fait partie de mon engagement présidentiel. Et je ne vais pas depuis ici, compte tenu des sujets qu'on est en train d'évoquer, de la lourdeur de l'actualité, de l'importance stratégique de cette tournée en Afrique, faire de nouveaux commentaires sur les commentaires. Je n'ai pas grand-chose de neuf à dire.
Donc ce qui m'importe, c'est surtout d'expliquer à nos compatriotes l'importance en effet dans un moment comme le nôtre, de passer 4 jours en Afrique, dans cette région qui est une région où une partie de notre Histoire s'est jouée. On était à Brazzaville hier, qui était la capitale de la France libre où il y a une partie de notre passé, mais surtout beaucoup de notre avenir, sur le plan climatique, sur le plan de la biodiversité culturelle, linguistique mais aussi sécuritaire.
Donc, je pense que c'est important que le président de la République française, que les ministres compétents puissent se déployer, y compris dans ces moments-là, pour porter la voix de la France et agir. Tout n'est pas suspendu à une seule chose et tout ne doit pas l'être. Donc nous continuons à avancer. Mais vous avez compris que je ne ferai pas davantage de commentaires sur la vie politique française ici depuis Kinshasa, à la fois parce que je n'ai pas grand-chose à dire et ensuite par respect pour nos amis, compte tenu de ce qu'ils sont en train de vivre.

 

Discours de Son Excellence Monsieur Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, Président de la République Démocratique du Congo, Chef de l’Etat, Président en exercice de la SADC à l’occasion du Forum Economique de Kinshasa
Excellence Monsieur le Président de la République Française,
Excellences, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs & Chefs des missions diplomatiques,
Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames, Messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs les Commissaires européens,
Distingués Invités,
Mesdames et Messieurs en vos titres et qualités respectifs,
La France et dans une plus large mesure l’Union européenne dont elle est un éminent membre, demeurent des partenaires historiques pour la République Démocratique du Congo et pour le continent africain dans son ensemble, notamment dans ce qui a trait aux questions économiques, sécuritaires, humanitaires, culturelles, éducatives et sanitaires.
Cette rencontre est donc une belle occasion d’assurer un suivi concret des engagements pris en février 2022 lors du sixième sommet « Union Européenne-Union Africaine » en impliquant les secteurs public et privé sur les sujets prioritaires identifiés.
En ces temps où de nombreux défis s’imposent à nos populations, aux niveaux local, régional et continental, il est important de pouvoir se rassurer de l’appui de nos partenaires en sus des inlassables efforts que nous déployons conformément aux responsabilités constitutionnelles et légales nous conférées par le souverain primaire, et que nous assumons avec dévotion. Je profite de cette occasion pour rappeler que la République Démocratique du Congo fait face, notamment :
• Sur le plan sécuritaire : à une agression vile et barbare de son territoire perpétrée par la République du Rwanda voisine, sous couvert du mouvement terroriste « M23 », et ;
• De manière plus générale, non seulement, à des défis climatiques liés à la préservation de son écosystème eu égard du rôle lui attribué dans la sauvegarde de la planète ; mais aussi, à des défis en termes infrastructurels, éducationnels, industriels et sanitaires, pour ne citer que ceux-ci.
Monsieur le Président, Mesdames et messieurs,
Ce forum économique a permis de faire un tour d’horizon des possibilités de coopération qui s’offrent communément à nos deux pays. A cet égard, j’aimerais adresser mes remerciements à vous tous qui avez activement participé aux différentes tables rondes organisées dans ce cadre et qui, par cet acte, avez mis au jour de nouvelles possibilités de rapprochement entre nos deux pays dans différents domaines et secteurs.
Cette initiative est d’autant plus à saluer qu’elle s’effectue à un moment particulier où mon pays s’est engagé à poursuivre des réformes dans plusieurs domaines prioritaires tels que :
• L’éducation et l’effectivité de la mise en œuvre de la gratuité de l’enseignement de base ;
• L’amélioration du climat des affaires à travers une série de réformes visant son amélioration et spécialement au plan de la sécurité juridique et judiciaire pour inciter plus d’investissements dans le pays ;
• Le domaine du numérique avec l’accélération des réformes visant à mettre en place un cadre adéquat pour le développement du numérique ; ainsi que,
• Le lancement d’un vaste programme de développement local des 145 Territoires que compte le pays.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Les deux dernières années ont démontré l’importance de renforcer la résilience de nos économies, notamment dans son adaptation à de nouvelles réalités provoquées par des chocs de tous types. En effet, la pandémie de COVID-19 puis le conflit russo-ukrainien ont de manière évidente révélée le besoin d’opérer des réajustements importants sur les différentes politiques et approches économiques adoptées à tous les niveaux au vu des effets négatifs générés par la survenance malheureuse de ces deux évènements.
C’est à la lueur de ce constat qu’il nous revient aujourd’hui de repenser notre cadre de coopération au regard de nouvelles priorités et enjeux de l’heure.
Il est ici question de souveraineté alimentaire et de santé publique, sans toutefois omettre la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique, qui demeurent tout aussi urgentes et pressantes que les premières. Je me réjouis donc que les dialogues qui ont animé ce forum se soient articulés autour des trois thématiques retenues en ce qu’elles s’inscrivent dans la droite ligne des conclusions du dernier Sommet Union européenne - Union africaine.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Tel que vous avez pu le découvrir au cours de ce forum, La République Démocratique du Congo offre de multiples opportunités d’investissements rentables et dispose de sérieux atouts pour bâtir un partenariat « gagnant-gagnant » et responsable.
Première productrice de cobalt au monde, avec un volume représentant près de 70% de la production mondiale, la République Démocratique du Congo abrite plus de 25 millions de tonnes de réserves identifiées dans son sous-sol, soit plus de 50% des réserves de la planète.
Notre sous-sol est également riche en d’autres minéraux tels que le cuivre, le manganèse, le chrome et le lithium, tous nécessaires à la fabrication des batteries électriques. Alors que l’on pensait que le plus grand gisement de lithium du monde se trouvait en Australie, des études récentes semblent démontrer qu’il pourrait se situer à Manono dans le Grand Katanga. La transition mondiale vers les énergies vertes et la décarbonation qui a stimulé la demande des véhicules électriques ne saurait donc se faire sans les métaux dits « stratégiques » pour la République Démocratique du Congo et « critiques » pour le reste du monde.
Cependant, notre positionnement actuel d’exportateur de minerais bruts, nous place au bas de la chaîne de valeur mondiale d’un marché qui atteindra 8,8 mille milliards de dollars américains d’ici 2025 et pour lequel nous ne captons que 3%.
Notre ambition est claire ! Il s’agit pour nous de promouvoir la transformation locale des ressources naturelles et placer la République Démocratique du Congo au cœur du développement d’une chaîne de valeur verte régionale de production de véhicules électriques. C’est dans ce cadre que nous avons signé un accord bilatéral de partenariat avec la République de Zambie afin de développer un projet précurseur ambitieux de production de batteries.
Cet accord offre un cadre pour la coopération bilatérale sur l’initiative visant le développement de cette chaîne de valeur ainsi que le renforcement de l’intégration économique au niveau sous-régional. Ce projet représente donc une opportunité pour les investisseurs intéressés de construire des partenariats inclusifs et durables et nous sommes résolus à tout mettre en œuvre pour garantir des conditions d’investissement optimales et promouvoir d’autres initiatives avec tous nos partenaires.
A cet égard, je ne pourrais manquer d’exprimer, d’ores et déjà, ma satisfaction quant à la conclusion du partenariat liant le Bureau de Recherches Géologiques et Minières de la France au Service Géologique National du Congo. Ce type de collaboration nous assure la continuité de l’exploration et surtout la maitrise de nos ressources pour que le pays joue pleinement son rôle dans la chaîne d’approvisionnement mondial des métaux stratégiques.
Il va de soi que tout partenariat ou projet en cours ou à développer dans ce secteur devra tenir compte non seulement des besoins de développement social de nos populations, mais aussi du respect des normes environnementales en vigueur.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
En ce qui concerne la chaîne d’actions liée à l’utilisation des nouvelles technologies et du numérique comme outil-support dans la définition de sa stratégie, la République Démocratique du Congo s’est distinguée par l’exécution, dans un temps record, des réalisations suivantes :
• La définition d’une vision du Numérique portée par le Plan National du Numérique Horizon 2025 ;
• La création d’une Agence pour le Développement du Numérique ;
• La définition d’un cadre institutionnel et de gouvernance par la promulgation en 2020 de la Loi relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication, et bientôt d’un Code du Numérique.
Ces réalisations vont de pair avec la nécessité d’assurer le développement des infrastructures numériques ainsi que des contenus numériques à offrir à la population, notamment.
En effet, les nouvelles technologies de même que le numérique constituent un levier d’intégration non-négligeable, mais aussi, une assurance en termes de bonne gouvernance, de croissance économique et de progrès social. Les possibilités de collaboration et partenariat sont multiples dans ce secteur. Plusieurs existent déjà et sont en cours d’exécution ; et nous espérons que d’autres se concluront à la suite de ce forum.
Des projets tels que la connectivité péri-urbaine, la création des centres d’accès communautaires aux outils du numérique, le support à la mise en œuvre du « E-Governement », l’accompagnement de la recherche scientifique et de l’innovation ou le support à l’opérationnalisation du cadre institutionnel sont des exemples des sujets qui pourraient vous intéresser.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
En ce qui concerne les infrastructures et villes durables, le Gouvernement s’est engagé à entreprendre une série d’initiatives et de réformes afin de soutenir l’intensification de la modernisation des infrastructures de base et l’aménagement du territoire national. Nos priorités se résument dans les points suivants :
• Le renforcement de la planification urbaine permettant d’identifier précisément les écosystèmes à mettre en place ;
• La promotion des investissements permettant d’accroitre l’accès aux infrastructures de base ;
• La promotion des villes vertes alliant renforcement du tissu économique, préservation des ressources planétaires, équité et cohésion sociale ;
• L’interconnexion entre les villes et ;
• Le partage de compétences dans le domaine technique. Alors que le Programme de Développement Local des 145 territoires, dont j’ai fait précédemment mention, se trouve dans sa phase d’exécution, les projections en termes de coopération et de partenariat sont encourageantes à travers les différents ouvrages prévus. Je voudrais ici également saluer la déclaration d’intention commune de la France via l’Agence Française de Développement et la République Démocratique du Congo en faveur d’un programme de financement d’infrastructures urbaines.
Excellence Monsieur le Président de la République Française,
Distingués Invités,
Mesdames et Messieurs,
J’aimerais une fois de plus saluer la rencontre de ce jour qui est le prolongement d’un partenariat qui se nourrit depuis des décennies et qui doit se réinventer au regard des nouvelles priorités comme celles qui ont fait l’objet des discussions au cours de ce forum. Je salue les efforts des partenaires et de la partie congolaise qui ont identifié des projets de coopération concrets, axés notamment sur le renforcement des capacités.
J’appelle de tous mes vœux que ce type de rencontre ne soit pas la dernière. J’ose croire que nous allons en renouveler les éditions pour continuer à bâtir une stratégie coordonnée profitable à nos deux pays respectifs.
Je vous remercie.

 

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