Journée mondiale du VIH/SIDA : à Kisantu, un silence qui révèle une faille dans la communication publique en santé
Alors que le monde entier marquait, ce 1er décembre, la Journée mondiale de lutte contre le VIH/SIDA, Kisantu s’est illustrée par un silence inhabituel. Dans plusieurs villes du pays, des activités de sensibilisation ont été organisées, notamment à Matadi où la Journée a été célébrée au Centre des jeunes de Mikondo, dans la commune de Mvuzi. Ces activités s’inscrivaient dans le cadre de l’Initiative présidentielle pour l’élimination du VIH/SIDA chez l’enfant (IPESE), centrée sur la prévention, le dépistage et l’accès aux soins.
À Matadi, jeunes et acteurs de santé ont été mobilisés autour du thème national : « Une riposte équitable pour une RDC sans sida d’ici 2030 ». Mais à Kisantu, l’ambiance était tout autre.
Aucune activité officielle, aucun message de sensibilisation diffusé dans les rues, aucune campagne sur les radios locales. La rédaction, après plusieurs tentatives, n’a pu joindre le médecin chef de zone, laissant planer un flou total autour de l’organisation ou plutôt de l’absence d’organisation de cette journée dans la cité.
Pour une agglomération à forte densité de jeunes, cette absence d’initiatives interpelle.
Les indicateurs de santé sexuelle à Kisantu sont préoccupants. D’après un rapport récent de l’ONG APEF, les quartiers de Kimbala, Kikonka et Nkandu enregistrent un nombre élevé de grossesses non désirées, symptôme d’un accès insuffisant à l’éducation sexuelle et aux services de prévention.
Ce manque d’encadrement se reflète dans les perceptions des jeunes. Sur vingt jeunes interrogés (16 à 24 ans), seuls deux ont affirmé utiliser régulièrement le préservatif. La majorité évoque des croyances erronées : le lubrifiant serait “dangereux”, le préservatif provoquerait des “problèmes de prostate”, ou réduirait le plaisir sexuel.
Ces idées reçues, véhiculées sans contradiction faute de campagnes éducatives, confirment un déficit d’information structurel.
La RDC a placé l’horizon 2030 comme objectif pour parvenir à une génération sans VIH. Toutefois, l’absence totale d’activités à Kisantu ce 1er décembre révèle un décalage inquiétant entre les orientations nationales et leur application locale.
Ce silence n’est pas un simple oubli dans le calendrier sanitaire : il traduit une faiblesse profonde dans la communication publique, un manque de coordination entre les services de santé et les relais communautaires.
À Kisantu, le mutisme autour de la Journée mondiale du VIH/SIDA met en lumière l’urgence d’une stratégie locale adaptée, centrée sur : l’éducation sexuelle complète, la correction des fausses croyances, l’implication des médias communautaires, et la mobilisation des écoles, paroisses et organisations de jeunesse.
Face à une population jeune, exposée et peu informée, la prévention ne devrait pas dépendre d’une date mondiale, mais d’un engagement continu. Le 1er décembre 2025 restera à Kisantu comme le symbole d’une occasion manquée et peut-être le point de départ d’une prise de conscience collective.
Bosco Kiaka



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