Les Etats-Unis en voie de congolisation

Les Etats-Unis en voie de congolisation

(Par le Prof.  Patience Kabamba)

Cette année, j’ai eu le privilège de passer une moitié de l’année aux États-Unis et l’autre moitié à Kinshasa. Après vingt ans de vie en Amérique et les trois dernières années à Kinshasa, où j’ai publié un livre sur le Congo intitulé Comment en finir avec la crise multiforme en République démocratique du Congo, chez L’Harmattan, je voudrai dans ce MDW esquisser des observations sur les États-Unis et la direction politique que prend ce pays, selon mes observations. Je voudrai commencer cette analyse en racontant une histoire de Madame Tolsi Gabbard, une politicienne américaine qui fut déployée comme soldate en Irak.

Elle a été représentante du Second district d’Hawaii de 2013 à 2021. Elle est la première Américaine de Samoa à siéger à la Chambre des Représentants. Elle fut candidate aux primaires démocrates de 2020. Et pendant un débat, elle lança une critique très articulée contre une autre candidate au nom de Kamala Harris, l’actuelle vice-présidente et candidate à la présidentielle de 2024. Mrs Galbbard reprochait à la vice-présidente Harris qu’alors qu’elle avait la possibilité de faire la différence lorsqu’elle fut procureure de la Californie, elle avait plutôt laissé les prisonniers noirs qui avaient déjà purgé leurs peines rester en prison pour être utilisés comme employés bénévoles par le système pénitentiaire. Elle avait reproché à Madame Harris de n’avoir aucune personnalité, de n’avoir montré aucun leadership quand elle était procureure de la Californie. Plus récemment, lors d’un commentaire à la télévision nationale, elle a conclu qu’une future administration Harris serait un jouet entre les mains du complexe militaro-industriel qui va continuer la guerre en Ukraine parce qu’ils y engrangent beaucoup de profits. En effet, plus ou moins 80 % de l’argent des contribuables américains destiné à l’Ukraine resterait aux USA pour l’achat d'armes. Pour avoir dit ce qu’elle a dit, Tultsi Gabbard se retrouve sur la liste des terroristes domestiques. Elle est soumise à une surveillance draconienne à chaque fois qu’elle voyage. Trois « air marchals » (gardes voyageant incognito) lui ont été assignés à chaque fois qu’elle prend un vol. La militarisation de la politique américaine n’est pas sans rappeler le sort des opposants politiques congolais. Les exemples des arrestations de Jean-Marc Kabund et des journalistes me viennent à l’esprit. 

Les journalistes américains se sont transformés en activistes politiques ; la grande majorité des chaines de télévision et des journaux se rangent derrière le Parti Démocrate. En lieu et place de donner des nouvelles, les journalistes s’adonnent à cœur joie à critiquer le Parti Républicain et son candidat aux présidentielles, Donald Trump. Les mêmes médias ont couvert pendant plusieurs années l’état cognitif défaillant du président Biden. En se révélant au grand jour lors du débat présidental, les médias ont incidemment insinué que le pays n’était pas dirigé par Biden étant donné l’état de santé de ce dernier. Et on a le droit de se demander qui dirige les USA aujourd’hui. En effet, le débat présidentiel avait démontré que le Président Biden ne dirigeait pas le pays. Les médias sont devenus des alliés du Parti Démocrate, exactement comme en R.D. Congo où la chaine de Radio et  Télévision Nationale (RTNC) est devenue l’organe de propagande du parti au pouvoir. A la télévision nationale congolaise, tout est fait pour présenter le gouvernement sous un beau jour. 

Enfin, le FBI, le très puissant Bureau fédéral d’investigation, est aussi devenu complice d’un parti politique. Le FBI a participé à la suppression sur Twitter des messages des membres du Parti Républicain.  Tweeter, avant son acquisition par Elon Musk, avait reçu des injonctions du FBI pour systématiquement élaguer les messages du Parti Républicain. Le message le plus emblématique est celui de l’ordinateur de Hunter Biden, le fils du Président, qui aurait abandonné son ordinateur chez un réparateur. Ce dernier, après avoir copié le disque dur, l’a remis au FBI. Le FBI a informé Twitter et Facebook de faire attention aux fausses informations en provenance de la Russie. En fait, le FBI avait récupéré le laptop du fils du Président Biden et avait pris connaissance du contenu et a préventivement ordonné aux médias de ne pas relayer cette information. Le FBI a participé à la propagation de mensonges en faveur d’un parti politique. Plus récemment, lors de l’assassinat manqué de Trump, le même FBI a reconnu des failles et de la négligence à protéger un candidat qu’il ne porte pas. Le FBI serait passé, comme le dit si bien Michael Waller, des héros de la Guerre froide aux vilains de l’État profond d’aujourd’hui (Cf. Waller’s Big Intel). L’État profond est l’ensemble des fonctionnaires non-élus, pour la plupart des Démocrates, qui finissent par prendre des décisions importantes sur les affaires de l’État. Au Congo, nous nous rappelons le nom de maman Marthe, la mère du président, qui décide parfois des postes à donner à tel ou à tel autre. 

Aujourd'hui, en Amérique, le FBI, les médias et le Parti démocrate sont de mèche pour déterminer les élections présidentielles, décider de la poursuite de la guerre en Ukraine pour que le complexe militaro-industriel engrange des bénéfices pécuniaires. Il y a des compagnies américaines qui se positionnent déjà pour la reconstruction de l'Ukraine, à l’exemple de BlackRock, et qui auraient tout intérêt à ce que la guerre puisse se poursuivre pour engranger le plus d’argent possible dans la reconstruction. La guerre sur les champs de bataille est évidemment la continuité de la production dans les usines ou dans la reconstruction. Au Congo, on confie à des compagnies amies d’énormes sommes d’argent pour des projets de l’État, qui, malheureusement, ne sont jamais achevés. Il est devenu courant au Congo que, sans passer par des appels d’offre, on passe les marchés de gré à gré ou mieux d’amis à amis. Le pouvoir utilise les moyens de l’État pour enrichir ses amis. On nomme ambassadeur une personne qui a soutenu financièrement la candidature du Chef. On nomme ministre des Affaires étrangères une personne qui a réuni 51 signatures des anciens directeurs de la CIA pour dire que ce qui se trouvait dans le laptop de Hunter Biden était de provenance russe. Au Congo comme aux USA, les choses se passent de la même manière.

Normalement, en pareil cas, les universités s’impliqueraient pour théoriser la situation et présenter aux hommes d’action, comme le disait Max Weber, les propositions pour sortir des moments difficiles. Malheureusement, au Congo comme en Amérique, les universités ont pris fait et cause pour le pourvoir. Aux USA, les professeurs d’université sont disproportionnellement de gauche et votent pour le Parti Démocrate. Certaines universités vont encore plus loin dans leur lien avec le Parti Démocrate. La faculté de Droit de l’université Georgetown dirige une équipe bien sélectionnée de personnes, qui sont pratiquement toutes de la gauche, pour assurer une transition paisible ‒ ce qui est un euphémisme pour dire autrement ce que Nancy Pelosi, l’ancienne présidente du Parlement, a dit en public : « Trump shouldn’t be near the White House », i.e. « Il ne faut pas que Trump soit proche de la Maison Blanche. » On comprend facilement que l’université, avec cette équipe d’une transition respectueuse composée pour la plus grande partie de personnes de la gauche, fera la police pour bloquer une transition si jamais Trump gagnait les élections. De plus, on sait que la Chine s’inquiète beaucoup du retour de Trump au pouvoir, car avec Biden, elle a pu avancer facilement ses pions aux USA ; elle a fait circuler un ballon sur le sol américain, elle a fait du business avec la famille présidentielle, etc. La Chine aurait remis près de 30 millions de dollars à la faculté de Droit de Georgetown University. On comprend que cette équipe de transition, quand bien même elle émanerait d’une université, sera difficilement neutre.

En conclusion : nous avons une alliance des médias, du Parti démocrate, du FBI, de Hollywood et des universitaires pour s’assurer que madame Kamala Harris, qui selon les mêmes médias était une candidate faible avant son élévation pour remplacer Biden, puisse gagner les élections. Nous sommes loin des Bill Clinton et Barak Obama, candidats et présidents démocrates extrêmement intelligents et capables de formuler de manière articulée des politiques gouvernementales claires. Aujourd’hui, on a des candidatures de gauche très moyennes et qu’il faut garder le plus longtemps possible loin de toute exposition intellectuelle et publique. Biden était dans sa cave pendant toute la campagne à cause de la COVID-19 et Kamala Harris est protégée contre toute interview qui l’éloignerait du téléprompteur ; une pratique qui paye sans doute, pourquoi pas. Au Congo, nous n’avons jamais eu un président qui a suivi une éducation formelle, à l’exception de Joseph Kasa-Vubu. Comme me disait un collègue après plusieurs visites en Afrique du Sud, «l’Afrique du Sud ressemble plus à l’Afrique qu’à l’Europe», je dirai que l’Amérique et le Congo ne présentent pas beaucoup de différences sur le plan politique et social.

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