Propositions pour l’organisation d’un Forum Patriotique pour la Refondation de la Nation

(Par Abbé José Mpundu)
Prêtre de l’archidiocèse de Kinshasa et Psychologue clinicien
« Réfléchissons ensemble, décidons ensemble et agissons ensemble » (J. MPUNDU)
Introduction
Le 24 janvier 2019, notre pays a connu sa première passation pacifique du pouvoir entre un Président sortant, Joseph Kabila Kabange, et un Président entrant, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, à l’issue des élections tenues le 30 décembre 2018. A la suite d’un accord signé entre les deux Présidents, le pays a été dirigé, de janvier 2019 jusqu’en décembre 2020, par une coalition au pouvoir composée par les deux familles politiques à savoir, le Front Commun pour le Congo, FCC en sigle, de Joseph Kabila et le Cap pour le Changement, CACH en sigle, de Félix Tshisekedi.
Estimant que le FCC lui mettait des bâtons dans les roues et l’empêchait de travailler selon sa propre vision, le Président Félix Tshisekedi a initié en octobre 2020, des consultations des leaders politiques et sociaux, au terme desquelles, il a mis fin à la coalition et créé l’UNION SACREE de la NATION.
Le parlement a connu de grands changements. A l’Assemblée Nationale, la Présidente Jeannine Mabunda a été remplacée par Christophe Mboso ; et au Sénat, le Président Alexis Tambwe Mwamba s’est vu remplacer par Modeste Bahati Lukwebo. Une nouvelle majorité parlementaire en faveur de Félix Tshisekedi a vu le jour à la suite du phénomène appelé « transhumance politique » dont nos politiciens congolais sont devenus quelque peu des champions.
Prenant la parole à l’occasion de la sortie officielle de cette nouvelle plate-forme politique, le 29 avril 2023, Vital Kamerhe, l’un des membres du présidium de l’Union Sacrée de la Nation, donne les raisons qui ont justifié sa création en ces termes : « Nous avons créé l'Union sacrée pour que nous soyons ensemble afin de combattre nos ennemis. Ces ennemis viennent du Rwanda et de l'Ouganda. Ils doivent rentrer chez eux. Nous avons également initié cette Union sacrée pour mieux diriger le pays et aussi préparer les prochaines élections tant présidentielles que législatives nationales et provinciales ».
A quelques mois de la tenue de ces élections générales, prévue pour le 20 décembre 2023, des voix se sont élevées de toute part pour réclamer un dialogue entre les parties prenantes. Pour certains, ce dialogue devrait servir à corriger les erreurs constatées dans l’organisation de ces élections ; pour d’autres, ce dialogue devrait plutôt donner naissance à une transition de 18 mois pour permettre une meilleure organisation des élections.
Tout cela, c’est du déjà entendu, du déjà fait dans notre pays. Il suffit d’évoquer ici les différents dialogues que notre pays a connus depuis la Table ronde de Bruxelles (20 janvier 1960-20 février 1960), la Conférence Nationale Souveraine (1991-1992), en passant par le Dialogue Intercongolais de Sun City (2002), le Dialogue de la Cité de l’Union Africaine (2016), et pour finir le Dialogue de la CENCO (2016). Tous ces dialogues se sont terminés de la même manière : le partage équitable et équilibré du pouvoir permettant aux uns et aux autres de se retrouver à la « mangeoire », le pouvoir étant considéré comme un « gâteau » que l’on doit se partager entre politiciens. Et dans tout cela, le peuple est resté le dindon de la farce, le laissé-pour-compte.
En fait, tous ces dialogues n’ont profité ni au peuple en termes de bien-être et de bien-vivre ensemble ni au pays en termes de développement et de progrès. Bien au contraire, le même spectacle s’offre à nous où nous voyons les leaders politiques s’enrichir de plus en plus et le peuple s’appauvrir de plus en plus, abandonné à son triste sort, condamné à la débrouillardise. Plutôt que d’aller de l’avant, le pays ne fait que régresser.
Le dialogue réclamé par les uns, essentiellement l’opposition, et rejeté par les autres, les tenants du pouvoir, n’a pas eu lieu. Bien au contraire, nous sommes allés aux élections législatives et présidentielles couplées.
Proclamé vainqueur de l’élection présidentielle avec 73% des voix, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, après avoir prêté serment le 20 janvier 2024, a commencé son second mandat. Contrairement à ce que certains craignaient, les résultats de cette élection présidentielle n’ont pas été contestés de manière significative. Et il n’y a pas eu de troubles comme certains le prévoyaient et le craignaient.
Malgré la tenue des élections, la guerre à l’Est du pays a continué et a pris de l’ampleur avec l’entrée en scène de l’Alliance du Fleuve Congo, AFC en sigle, mouvement rebelle de Corneille Nanga, qui s’est alliée au M23. La prise de Goma et par la suite de Bukavu par les forces rebelles n’ont fait qu’aggraver la crise sécuritaire et humanitaire que connaît notre pays depuis trois décennies. A la guerre de l’Est s’ajoute le conflit violent qui se vit à l’Ouest avec le mouvement des Mobondo. A l’heure actuelle, le bilan est lourd avec des milliers de morts, sans compter les déplacés et autres victimes de ces violences meurtrières.
A côté de cette crise sécuritaire, la misère du peuple ne fait que s’accroître. Les antivaleurs à la tête desquelles trônent la corruption et le tribalisme-népotisme, sans parler de l’impunité, deviennent la règle et sont tolérées voire même récompensées.
Face à cette situation désastreuse, différentes initiatives sont prises pour ramener la paix et la sécurité dans le pays et dans la région des grands lacs. Les plus importantes sont : l’accord de Washington entre la RDCongo – le Rwanda – les USA, les négociations ou pourparlers de DOHA entre l’AFC/M23 et le Gouvernement RD Congolais, le Pacte Social de la CENCO/ECC pour la paix et le bien-vivre ensemble, les appels à un dialogue national inclusif, la conférence sur la paix et la sécurité organisée par la Fondation Thabo Mbeki en Afrique du Sud.
Comme en 2023, des voix s’élèvent pour réclamer la tenue d’un dialogue national inclusif en vue de résoudre les problèmes de la RD Congo. D’autres voix s’élèvent pour s’opposer à toute forme de dialogue et défendent l’idée d’attendre la tenue des élections en 2028.
Pour ma part, il est plus que temps pour les Congolais de s’arrêter, de faire un STOP, en vue d’une remise en question personnelle et collective qui prendrait la forme d’un FORUM PATRIOTIQUE POUR LA REFONDATION DE LA NATION.
Nécessité d’un STOP, d’une HALTE pour se mettre en FORUM
La RDC peut être comparée aujourd’hui à un véhicule qui voit des voyants rouges clignoter sur le tableau de bord. Un bon chauffeur qui veut arriver à destination sans incidents, dès qu’il voit des clignotants rouges sur le tableau de bord de son véhicule, s’arrête, descend du véhicule, ouvre le capot et fait le constat de ce qui ne va pas. Il verra par exemple qu’il y a de l’eau qui coule, de l’huile qui suinte quelque part, de la fumée, une odeur de brûler, une courroie cassée, bref, il va voir ce qui ne va pas. Sans tarder, il appellera un mécanicien, un spécialiste, un expert en mécanique auto pour examiner et établir un diagnostic.
Dans le cas du véhicule RDC, non seulement que le moteur, c’està-dire, le système dans lequel nous vivons, est foutu, mais c’est tout le véhicule qui est déclassé. Il nous faut un nouveau véhicule avec un autre moteur. Le moteur en question, c’est le système capitaliste ultralibérale dans lequel nous vivons depuis des siècles et qui est décrié là d’où il nous est venu. Ce système fondé sur le primat de l’avoir ne fonctionne plus là où il a été créé. Et, il est à la base de la déshumanisation et de la chosification de l’homme dans le monde en général et en RDC en particulier.
Il est donc impérieux pour nous congolais de faire un STOP, une HALTE. Oui nous devons nous arrêter parce que le véhicule RDC est en train d’aller tout droit vers un mur ; il est au bord d’un fossé. Si nous continuons à rouler, si nous nous entêtons à poursuivre notre course, nous risquons de disparaître de la carte du monde et de l’Afrique. Alors, impérativement, il est temps de nous ARRETER et de nous examiner en vue de voir ce qui ne va pas et de décider le changement de véhicule, de décider la construction d’un NOUVEAU CONGO, d’un AUTRE CONGO. Un Congo qui sera fondé sur le primat de l’ETRE et non celui de l’AVOIR.
Pour ce faire, en lieu et place d’un dialogue comme nous avons pris l’habitude d’en faire, un dialogue qui réunirait les leaders politiques et sociaux, nous proposons l’organisation d’un FORUM PATRIOTIQUE POUR LA REFONDATION DE LA NATION, FO.PA.RE.NA. Ce forum ne sera ni une Conférence Nationale Souveraine (bis) ni un quelconque dialogue comme nous en avons connu et vécu dans l’histoire récente de notre pays.
Les deux conditions sine qua non pour la réussite du FORUM
Pour que ce FORUM profite à notre Nation et au peuple congolais, il faudrait qu’il remplisse les deux conditions principales, majeures suivantes. D’abord, il doit être une initiative des congolais pour les congolais à savoir : il doit être conçu par les congolais, organisé et financé par les congolais sans ingérence extérieure de ceux qui se prennent pour les « maîtres du monde ». Ce Forum devra nous permettre de « Parler Congo » entre nous congolais sans interférence ni ingérence de l’extérieur.
Ensuite, il ne devra pas viser comme objectif final le partage équitable et équilibré du pouvoir. Le pouvoir doit être donné par le peuple pour le peuple à ceux qui correspondront à un profil impersonnel convenu de commun accord par tous les congolais.
Si ces deux conditions ne sont pas réunies, alors, ce FORUM ne servira strictement à rien si ce n’est qu’à refaire ce que nous avons toujours vécu et nous tournerons en rond.
La nature et les objectifs du FORUM
Le FORUM PATRIOTIQUE POUR LA REFONDATION DE LA NATION sera non seulement un lieu mais surtout un moment de remise en question globale par tout le peuple congolais du système actuel qui est déjà foutu et qui est à déclasser, mais surtout un temps de conception et d’élaboration d’un plan d’action pour la construction, ensemble, d’un NOUVEAU CONGO, d’un AUTRE CONGO.
Il devra viser la REFONDATION de la NATION. Une Nation qui sera réellement SOUVERAINE, LIBRE et INDEPENDANTE. Une Nation qui établira avec les autres Nations du monde des relations de vrai partenariat gagnant-gagnant, adulte-adulte dans le respect de la culture de l’autre et des lois qui régissent les relations internationales en particulier celle de la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres Etats.
Conquérir notre SOUVERAINETE et sortir de la TUTELLE dans laquelle nous sommes maintenus malgré l’indépendance formelle nous octroyée en 1960 par les colons, telle doit être la finalité de ce
FORUM.
Le contenu du FORUM : les six questions fondamentales
Pour atteindre ses objectifs, nous proposons que le FORUM tourne autour des six questions suivantes :
1°) Qui sommes-nous ?
Notre identité en rapport avec notre conscience d'humanité : sommes-nous encore des êtres humains ? Nous considérons-nous nous-mêmes comme des êtres humains ? Nous traitons-nous entre nous congolais comme des êtres humains ? Est-ce que les autres (colonisateurs et néocolonisateurs) nous considèrent-ils comme des êtres humains et nous traitent-ils comme tels ? En définitive, nous devrions nous poser la question de savoir : qu’est-ce qui nous rend humains ?
2°) D'où venons-nous ?
Nous avons le devoir de connaître nos origines, notre histoire qui ne commence pas avec la traite négrière ou avec la colonisation .... Nous avons une histoire à laquelle nous devrions nous référer avant ces œuvres de déshumanisation du congolais que sont la traite négrière et la colonisation… C’est l’histoire de nos empires, de nos royaumes, de nos villages, etc. Nous devons connaître ceux qui ont joué un rôle important dans notre histoire tels les Kimpa Vita, les Simon Kimbangu, les Lumumba Patrice, les Joseph-Albert Malula, cardinal, les Kasa-Vubu, les Mobutu, les Laurent-Désiré Kabila, etc.
3°) Où sommes-nous ?
Il s’agit ici de procéder à une analyse critique de notre situation actuelle sur tous les plans : politique, économique, culturel et social. C’est le temps de la remise en question, de l'autocritique où nous nous interrogerons sur la responsabilité de chacun et notre responsabilité collective. En lieu et place de chercher des boucsémissaires à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, chacun devrait se poser la question de savoir ce qu’il a fait ou omis de faire pour que nous en arrivions là où nous sommes aujourd’hui. Il n’est certes pas question d’ignorer la responsabilité des autres, mais il est important de savoir que ces autres agissent souvent en se servant de nous, en nous instrumentalisant. Les autres ne peuvent rien et ne font rien sans notre collaboration, sans notre complicité consciente ou inconsciente.
4°) Où allons-nous ?
Quelles sont les conséquences de ce que nous vivons aujourd'hui.... Notre aujourd'hui prépare quel avenir, nous conduit où ? Si nous continuons à gérer notre pays comme nous le faisons aujourd’hui et si nous continuons à vivre comme nous vivons aujourd’hui, que serons-nous dans dix ans, dans quinze ans, dans trente ans, dans cinquante ans ?
5°) Où voulons-nous aller ?
Question déterminante qui nous pousse à nous projeter dans le futur, à exprimer notre rêve pour le Congo : quel est le Congo dont nous rêvons ensemble et que nous voulons bâtir ensemble ? il s'agit d'un projet collectif qui sera la boussole qui guidera tous les acteurs politiques et sociaux chacun apportant bien entendu sa pierre de construction, selon son génie propre, ses compétences et son point de vue.
6°) Que faire pour passer du rêve à la réalité ?
Une fois que nous nous serons mis d’accord sur le Congo de nos rêves, nous pouvons alors penser à la programmation, planification des actions à entreprendre pour bâtir ensemble ce NOUVEAU CONGO, cet AUTRE CONGO en nous posant les questions : qui fait quoi ? avec qui ? avec quoi ? quand ? comment ? où ?
C’est la réponse à la question « qui va faire quoi ? » qui va nous amener à parler de la répartition des tâches et non de partage du « gâteau ». Cette répartition des tâches et la désignation des conducteurs des travaux de construction de notre « maison commune » que sera le Nouveau Congo, se feront sur base d’un profil impersonnel des leaders dont nous avons besoin.
Nous pouvons nous inspirer de ce que le politologue camerounais, Samuel Eboua, propose comme portrait-robot des dirigeants dont l’Afrique a besoin et nous, nous dirons dont le Congo a besoin. En le paraphrasant, nous pouvons dire : « « le nouveau Congo a besoin d’hommes et de femmes d’action pénétrés de l’intérêt supérieur de l’Etat, des hommes et des femmes intègres, compétents, travailleurs, meneurs d’hommes, des hommes et des femmes tolérants, rassembleurs, mais intraitables lorsqu’il s’agit de défendre l’intérêt général, des hommes et des femmes capables de réaliser beaucoup avec peu de moyens. Il s’agit d’hommes et de femmes qui n’aiment pas le pouvoir pour le pouvoir, mais pour qui ce dernier ne constitue qu’un instrument leur permettant de réaliser leur idéal au profit de la communauté nationale, et qui sont capables de s’en dessaisir dès lors que, pour une raison ou une autre, ils estiment ne pas être en mesure de réaliser cet idéal… Ces hommes et ces femmes, bien que rares, ne sont pas complètement absents du Congo actuel. Il suffit de les dépister et de les responsabiliser » (EBOUA S., Interrogations sur l’Afrique noire, Editions L’Harmattan, Paris 1999, p. 177).
Nous avons besoin ici d’un leadership d’équipe où les gens sauront travailler ensemble pour le bien de l’ensemble de la communauté, dans le respect des compétences des uns et des autres, dans la complémentarité.
Ces leaders incarneront cette vision commune et démontreront, dans leur vie familiale, socio-politique et professionnelle, la mise en œuvre de cette vision à un niveau microsocial.
Pour réaliser le choix de ces dirigeants, nous n’aurons pas besoin de recourir au modèle électoral nous imposer par les Occidentaux, modèle qui, par ailleurs, a, non seulement, montré ses limites mais a carrément échoué ici chez nous. Il suffit toutes les violences pré et post électorales qui ont fauché la vie à tant de nos compatriotes. Et puis tous ces dialogues qui interviennent et qui aboutissent au partage du pouvoir alors qu’on a eu des élections très coûteuses, démontrent à suffisance que nos élections ne servent à rien. Et le plus grave c’est d’avoir des élections dont les gagnants sont connus d’avance si pas désignés à coup de billets de banque.
Au sujet des limites du système électoral, il suffit de lire le livre assez récent de David Van Reybrouck au titre évocateur et provocateur : Contre les élections (Ed. Actes Sud, 2014) où il dit :
« Notre démocratie représentative est aujourd’hui dans une impasse. Sa légitimité vacille : de moins de gens vont voter, les électeurs font des choix capricieux, le nombre d’adhérents des partis politiques est en baisse. En outre, l’efficacité de la démocratie est violemment mise à mal : toute action énergique de l’exécutif devient problématique, les hommes politiques adaptent de plus en plus leurs stratégies en fonction des échéances électorales. Cet état de fait, David Van Reybrouck l’appelle « le syndrome de fatigue démocratique » et il s’interroge sur les moyens concrets d’y remédier. Suivant les travaux récents de politologues renommés, il préconise de remettre à l’honneur un grand principe de démocratie qui a connu son apogée dans l’Athènes classique : celui du tirage au sort » (Editeur)
Nous devrions faire preuve de créativité, d’inventivité, d’imagination créatrice pour désigner les personnes qui répondent au profil convenu et qui sont capables de travailler en équipe pour le bien-commun. C’est ici le lieu de se poser la question : comment faisaient nos ancêtres pour désigner les dirigeants de la communauté ? du village ?
Le Congo dont je rêve
A la question déterminante concernant le Congo de nos rêves, le Congo que nous voulons bâtir ensemble, je voudrais ici partager mon rêve.
Pour ma part, le Congo de nos rêves devrait être fondé sur des valeurs humanistes partagées par tous et toutes. Ces valeurs constitueront les piliers sur lesquels reposeront la nouvelle maison Congo. Et j’en vois quatre et chacune avec son corollaire.
Un Congo qui sera bâti sur la valeur de l’Egalité de tous les fils et toutes les filles qui partagent la même nature humaine, la même dignité humaine. En termes clairs, un Congo où aucun congolais ne sera au-dessus de l’autre à cause de son sexe, de son appartenance idéologique ou religieuse, ou à cause de son statut socio-économique.
Ce Congo égalitaire qui ne signifie pas égalitarisme ou uniformisme ou encore unanimisme, impliquera le Respect de l’homme, respect de chacun et de chacune dans sa différence. Aucune différence n’autorisera une quelconque domination. Bien au contraire, les différences légitimes seront là pour permettre une complémentarité à la manière des couleurs de l’arc-en-ciel.
Un Congo qui sera construit sur la valeur de la Participation où chacun et chacune pourra avoir un mot à dire à tous les niveaux : réflexion, prise de décision, exécution, évaluation. D’une manière directe ou indirecte, chaque citoyen pourra participer, apporter sa pierre pour l’édification d’une nation prospère.
Cette participation ira de pair avec le sens de Responsabilité. Il n’y aura plus d’un côté les responsables et de l’autre des irresponsables qui sont là à regarder les autres faire, à subir l’agir des autres, des dirigeants. Il n’y aura pas de place pour des acteurs d’un côté et des spectateurs de l’autre. Chacun et chacune des fils et filles de ce nouveau Congo aura à répondre de ce qu’il a fait ou n’a pas fait pour la construction et le progrès du pays. Chacun et chacune aura à rendre compte de son engagement.
Un Congo qui sera fondé sur la valeur de Liberté où chacun et chacune pourra jouir des libertés reconnues à tous et à toutes par la constitution de notre pays et par la déclaration universelle des droits humains. Cette liberté sera fondamentalement la liberté du cœur vis-à-vis des trois sources d’asservissement de l’homme que sont : l’argent, le pouvoir et les honneurs. Elle sera aussi la liberté des structures de la société que sont l’idéologique, le politique et l’économique. En effet, nous rêvons d’un Congo qui sera plus esclave des maîtres du monde ou de ce qu’on appelle « Communauté Internationale ». Un Congo libre de penser, de décider et d’agir pour le bien de son peuple sans subir le diktat de l’étranger.
Cette liberté sera le fruit de la Vérité car seule la vérité engendre la vraie liberté sur tous les plans : personnel et collectif, idéologique (culturel), politique, économique et social. Vérité sur l’homme, vérité sur Dieu, vérité sur le pouvoir, vérité sur l’avoir et vérité sur le valoir.
Un Congo qui sera bâti sur la valeur de la Justice : justice distributive ou sociale, justice dans l’exercice du droit et surtout justice-miséricorde qui détruit le mal sous toutes ces formes et sauve le malfaiteur que nous sommes tous, chacun à son niveau et sa manière.
Cette justice engendrera à son tour la vraie paix, la paix durable dont nous avons tous besoin sur toute l’étendue du territoire national. Il n’y a pas de paix sans justice. Cette paix n’est synonyme d’absence de guerre. Elle est paix du cœur et paix sociale qui ne supprime pas les conflits mais qui transforme les conflits en source de progrès et de développement. Une paix qui a pour nom : amour, justice et vérité.
Je rêve enfin d’un Congo de Solidarité et de Partage. Ce Congo de mes rêves sera une terre où les habitants seront solidaires dans le bien et vivront dans le partage équitable de tous les biens qu’elle contient.
Les principes de légitimité politique
La politique de ce Nouveau Congo de nos rêves, pour qu’elle soit légitime, devrait s’inspirer des quatre principes suivants, tirés du « Manifeste Convivialiste » (Ed. Le Bord de l’Eau, 2013, p. 24) :
- principe de la commune humanité ;
- principe de la commune socialité ; principe de l’individuation ;
- principe de l’opposition maîtrisée.
Principe de commune humanité : par-delà les différences de tribus ou d’ethnies, de partis politiques ou d’idéologie, de langue ou de culture, de religion ou de richesse, de sexe ou d’orientation sexuelle, il n’y a qu’une seule humanité, qui doit être respectée en la personne de chacun et chacune des fils et filles du Congo. Tout congolais devrait regarder l’autre congolais comme un être humain comme lui.
Principe de commune socialité : les êtres humains – et les congolais le sont - sont des êtres sociaux pour qui la plus grande richesse est la richesse de leurs rapports sociaux égalitaires et non de domination.
Principe d’individuation : dans le respect de ces deux premiers principes, la politique légitime est celle qui permet à chacun congolais d’affirmer au mieux son individualité singulière en devenir, en développant ses capabilités, sa puissance d’être et d’agir sans nuire à celle des autres, dans la perspective d’une égale liberté.
Principe d’opposition maîtrisée : parce que chacun a vocation à manifester son individualité singulière, il est naturel que les humains puissent s’opposer. Mais il ne leur est légitime de le faire qu’aussi longtemps que cela ne met pas en danger le cadre de commune socialité qui rend cette rivalité féconde et non destructrice.
La politique bonne est donc elle qui permet aux êtres humains de se différencier en acceptant et en maîtrisant le conflit.
La mobilisation des ressources financières pour bâtir le Congo de nos rêves
La mobilisation des ressources financières devrait faire suite aux programmes d’action que nous voulons réaliser dans notre pays.
En ce qui concerne les programmes et stratégies d’action, les congolais réunis en dialogue pourront baliser le chemin en proposant les grands principes fondamentaux qui doivent guider le choix des actions prioritaires à mener pour la construction du nouveau Congo : actions d’éducation et de formation humaine, civique et patriotique, actions visant la construction d’une armée républicaine et d’une police qui protège le peuple, actions visant la mise en place d’une politique de l’emploi et des salaires équitables permettant de vaincre la pauvreté, bref, actions pour l’amélioration du vécu quotidien du congolais.
Au cours de ce Forum, le peuple congolais, unanime, procédera à une évaluation sans complaisance et en vérité de ce qui se passe dans notre pays et confrontera cela avec la vision et prendra les décisions qui s’imposent pour la construction de ce nouveau Congo.
Les moyens financiers pour mettre en application ces décisions coulées en plan d’action viendront de nous-mêmes les congolais. Pour cela, la création d’un Fonds National pour la Reconstruction du pays pourrait être cette structure qui va permettre de mobiliser les ressources financières nécessaires pour la construction d’un nouveau Congo, un Congo Plus Beau qu’avant.
Un comité de gestion sera mis en place composé de personnes réputées pour leur honnêteté et probité morale. Comme toute gestion nécessite un contrôle, un comité d’audit externe sera mis en place pour évaluer le travail des gestionnaires et les aider à mieux gérer.
En guise de conclusion
En guise de conclusion, il conviendrait de dire que le FORUM PATRIOTIQUE POUR LA REFONDATION DE LA NATION ne sera pas, comme par le passé, une rencontre entre les politiciens ou les leaders de la société civile.
Il sera d’abord un état d’esprit qui engage tous les congolais, ceux qui sont au pays et ceux qui sont dans la diaspora. Chaque compatriote et citoyen congolais devra s’approprier les cinq questions et leur donner une réponse personnelle. D’où la nécessité de traduire ces cinq questions dans nos langues locales pour permettre à chacun de se les approprier.
Ensuite, les congolais se mettront ensemble, au niveau des rues, des quartiers, des communes, des provinces et enfin au niveau national pour travailler à ces questions.
Enfin, un groupe de personnes dont trois ou cinq par provinces, se retrouvera à Kinshasa ou dans une autre ville du pays, par exemple à l’Est du pays, où les congolais sont massacrés, pour une mise en commun de toutes les réponses du peuple congolais et pour l’élaboration d’un document final qui sera comme le référentiel de tout congolais en général et, en particulier, de tout congolais qui veut s’engager pour le service de la communauté nationale.
Ce document sera comme la CHARTE de notre vivre-ensemble contenant les principes sur lesquels tous nous nous serons mis d’accord et auxquels personne ne pourra s’y déroger. Sur base de cette Charte, les juristes pourront s’atteler à l’élaboration d’une loi fondamentale, d’une nouvelle Constitution qui sera authentiquement congolaise, par les congolais et pour les congolais.
Enfin, à la question de savoir qui doit mettre le peuple congolais en FORUM, la réponse est claire : c’est le Chef de l’Etat. C’est à lui qu’il appartient de convoquer ce FORUM et de mettre en place un comité organisateur.
Fait à Kinshasa, le 7 septembre 2025
Abbé José MPUNDU
Prêtre de l’archidiocèse de Kinshasa et Psychologue clinicien
Tél. : +243997030932 ou +243818133765 ou +243856467887
E-mail :
Comments est propulsé par CComment