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Mes recommandations pour la réforme de la justice dans le sens de la lutte contre la corruption

Mes recommandations pour la réforme de la justice dans le sens de la lutte contre la corruption

(Par Bamuangayi Kalukuimbi Ghislain)

La corruption et la concussion sont structurées en République Démocratique du Congo à travers des réseaux mafieux, capables d’autoprotection, de résistance et d’absorption d’une lutte de faible intensité. C’est des organisations dont le fonctionnement intègre la livraison de certains de leurs membres à la justice pour couvrir les grands manitous et empêcher de creuser en profondeur.

Des mesures prises pour s’attaquer à une fièvre de la justice malade, ne tenant pas compte du système de prédation mise en place, n’apporteront rien de consistant. Le réseau d’acquisition et de vente des maisons de l’Etat engage, pour son succès, des avocats, des magistrats, des membres du gouvernement, des agents des affaires foncières, des hommes d’affaires, des journalistes, des militaires, des parlementaires…

A la manière d’une association des malfaiteurs, des rôles sont exécutés, parfois de manière isolée et sans une connexion entre eux ou avec le tireur des ficèles. L’avocat, dont l’appétit du gain facile et rapide domine son serment, se trouve des arguments pour accepter une cause injuste, peut ne pas en connaître le bénéficiaire final. Le greffier, payé pour fabriquer ou falsifier un jugement, peut en ignorer l’utilisation finale. La corruption, l’inconscience et le manque de sérieux dans son travail permettent de relier les divers acteurs de la mafia. Chacun profite de sa position sociale, de sa fonction d’Etat, de son grade, de ses moyens d’influence sociale, de son ascendance ou de la faiblesse de l’autre pour abuser ou exploiter une situation en sa faveur. Le congolais est devenu le loup pour le congolais. Seulement, l’état de fonctionnement de l’Etat est tel que les infracteurs économiquement puissants trouvent des facilités d’opérer et une protection, y compris lorsqu’ils sont en prison ou en liberté provisoire.

Pire encore, c’est le congolais politicien de la race léopoldienne des prédateurs : roublards, escrocs, condescendants, prêts à tuer pour son intérêt et sans compassion envers les victimes de leur cruauté. Ce qui n’est pas une fatalité. Nous pouvons changer l’ordre des choses et construire un système de gouvernance fondé sur le respect de la vie et la foi dans le travail honnête et bien fait, ainsi que sur le souci de l’honneur, de la réussite par le mérite, de l’effort personnel et collectif et de la satisfaction dans le bien fait à l’autre ou à la communauté.

Le type d’action populaire du Ministre d’Etat Constant Mutamba aidera à solutionner des cas et à nourrir, pour un temps, l’espoir de la population de guérir la justice. Mais, cette manière d’agir court le grand risque d’être un remède inefficace si elle ne s’accompagne d’une action structurée et bien réfléchie de nature à détruire un système mafieux, dont les racines sont dans le mental du grand nombre des gouvernants et des gouvernés, qui pensent vivre ou survivre par la prédation.

Lorsque la corruption et l’impunité sont consacrées à travers des lois taillées sur mesure, le seul courage politique salutaire à démontrer est celui d’insuffler un esprit nouveau permettant la renaissance de l’ordre juridique.

En assurant légalement une sorte d’impunité en faveur d’un ancien Président de la République, ce dernier entraine dans son privilège légal de citoyen exceptionnel un grand nombre de personnes qui ont participé à ses crimes.

Quelques cas de ceux qui ont le privilège de joindre le ministre peuvent être traités. Il y en aura combien, alors que le fléau est national, sur 2.345.410 Km², sur une plus grande partie inaccessible et presqu’en dehors de la modernité ?! Il faut une lutte permettant aux institutions de fonctionner pour répondre directement au besoin, au lieu de laisser la solution à un leadership singulier et éphémère. On ne peut avoir un résultat fiable et durable contre des épidémies du genre injustice, corruption et concussion en les laissant entre les mains du ministre de la justice sans une volonté de leur éradication largement partagée entre le parlement, le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire et la société civile.

L’administration publique, qui dispose d’un personnel qualifié pour enregistrer les doléances des administrés et pour rendre les services dont la population a besoin, devra fonctionner et laisser le personnel politique faire son travail de conception des politiques publiques, d’élaborations des textes juridiques, de programmation des actions, d’orientation de la société, de mise en œuvre des politiques et d’application des principes. Ce dysfonctionnement de tout le monde qui fait tout pour montrer l’efficacité sur terrain est le signe de crise du système de gouvernance.

Chaque fois que le Président de la République ou un ministre doit se trouver sur un chantier pour que les travaux se fassent ou reprennent, il est clair que la chaîne de commandement est en panne. Un maillon de la chaine de gouvernance n’a pas fonctionné. Le système de gouvernance doit fonctionner pour que chaque acteur soit à sa place, y travaille, rende compte et soit sanctionné ou écarté lorsqu’il devient un blocage ou un danger pour l’intérêt général. N’allons-nous pas perdre beaucoup d’énergie dans des gesticulations et harangues spectaculaires sans toucher le fond des problèmes ?! Il faut oser des réformes audacieuses et courageuses pour toucher la racine du mal, même lorsqu’elles doivent exiger une nouvelle Constitution, de nouvelles lois et d’autres acteurs appropriés.

QUELQUES PROPOSITIONS A INTEGRER DANS LA REFORME DE LA JUSTICE CONGOLAISE POUR LES BESOINS DE LUTTE CONTRE LA CORRUPTION ET LA CONCUSSION SONT SUR LE PLAN DES TEXTES JURIDIQUES.

  1. L’ASSURANCE D’UNE JUSTICE INDEPENDANTE PAR LA DOTATION DU POUVOIR JUDICIAIRE D’UN BUDGET PROPRE, élaboré par les magistrats en fonction des besoins du Pouvoir judiciaire, envoyé au Parlement pour insertion dans le budget général, défendu au Parlement et exécuté par le Président du Conseil supérieur de la Magistrature.

Un tel budget devra donner à chaque magistrat une meilleure qualité de vie, le mettant à l’abri de la pauvreté et dans les meilleures conditions de travail. Le Gouvernement ne devra surtout pas intervenir dans l’exécution du budget du Pouvoir judiciaire pour respecter son indépendance. Mais l’exécution de ce budget devra être soumise au contrôle juridictionnel de la Cour des comptes et administratif de l’Inspection Générale des Finances.

2. LA PARTICIPATION DE LA POPULATION A LA DESIGNATION DES MAGISTRATS POUR JUSTIFIER CETTE JUSTICE RENDUE AU NOM DU PEUPLE par : - l’affichage de la liste des candidats magistrats en vue d’éventuelle opposition, comme cela se fait pour les avocats. - L’examen des dossiers des candidats par une commission ad hoc constituée des représentants du Conseil supérieur de la magistrature, du Parlement, de la Présidence de la République, du Ministère de la Justice, du Barreau et de la société civile, avant la nomination par le Président de la République.

3. LA REDEFINITION DU CONSEIL SUPERIEUR DE LA MAGISTRATURE POUR LE CORRESPONDRE AVEC LA JUSTICE RENDUE AU NOM DU PEUPLE en intégrant dans cette structure, avec voix consultative, les représentants des avocats, de la société civile et du personnel judiciaire.

4. LA SUPPRESSION DES PRIVILEGES DE POURSUITE DONT JOUISSENT UN ANCIEN PRESIDENT DE LA PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, UN ANCIEN PREMIER MINISTRE ET LES PARLEMENTAIRES, de manière à restreindre le cercle de l’impunité des gouvernants.

5. LA PENALISATION DE L’ABSTENTION DE DENONCIATION AVEREE D’UNE INFRACTION GRAVE, notamment dans les cas du crime de sang, de la trahison, de l’espionnage, du détournement public, de la fraude économique, de faux en écriture. Une disposition qui devra s’accompagner du système de protection et d’encouragement du dénonciateur.

6. LA CONDAMNATION AU PAIEMENT DES DOMMAGES ET INTERETS DU MAGISTRAT RECONNU COUPABLE DE DOL, DE CONCUSSION OU DE DENI DE JUSTICE SUR PRISE A PARTIE. Le magistrat devra réparer personnellement sa faute et laisser l’Etat congolais venir uniquement en garantie de paiement.

7. L’INSTAURATION D’UN REGIME DE SANCTION ET D’INDEMNISATION CONTRE TOUT RETARD VOLONTAIRE, NON JUSTIFIEE OU ABUSIF DANS LA DELIVRANCE D’UN ACTE ADMINISTRATIF OU JUDICIAIRE en adaptant et élargissant le champ d’application de l’article 150 g du Code pénal, livre II, apparemment tombé en désuétude : « … tout fonctionnaire public, officier public, toute personne chargée d'un service public qui s'abstiendra volontairement de faire, dans les délais impartis par la loi ou par les règlements, un acte de sa fonction ou de son emploi qui lui a été demandé régulièrement, sera puni d'une servitude pénale de six mois ….

Il en est de même lorsqu'il s'abstient volontairement de faire un acte de sa fonction ou de son emploi pour lequel aucun délai n'a été préétabli et qui lui a été demandé régulièrement, si ce retard est manifestement exagéré ». 

8. LA REFORME DU BARREAU EN :

a) Incluant dans la formation de l’Avocat stagiaire un passage d’un an au Parquet et au Centre de documentation du Ministère de la Justice pour lui permettre d’avoir une meilleure maîtrise de l’appareil judiciaire et de la jurisprudence. Ce qui peut permettre aussi de régler la question de carence des magistrats du Parquet.

b) Créant une fédération des barreaux, dont le rôle essentiel sera d’harmoniser les règles de la profession d’Avocat.

c) Rendant obligatoire la formation continue, pour chaque Avocat, par la participation à des conférences, des séminaires de formations, des cours d’approfondissement. Un nombre d’heures/an de formation sera déterminée, à défaut duquel une action disciplinaire est engagée.

d) Organisant la responsabilité civile de l’Avocat pour ses fautes professionnelles et la couverture de ses risques par une assurance obligatoire.

9. L’OBLIGATION POUR TOUT MAGISTRAT DE PUBLIER OU DE SUIVRE UN NOMBRE D’HEURES DETERMINEES DE FORMATION pour obtenir une promotion.

10.LA POURSUITE EN JUSTICE POUR REBELLION DE TOUT MAGISTRAT QUI REFUSE DE REJOINDRE SON LIEU D’AFFECTATION. L’installation des tribunaux devra s’accompagner d’autres services : police, prisons, inspecteurs judiciaires, barreaux, logements…C’est une grande opportunité de créer des emplois à l’intérieur du pays.

11.LA REFORME DU PROGRAMME DES COURS DE LA FACULTE DE DROIT, afin d’assurer la collaboration entre l’Université et l’appareil judiciaire et d’intégrer les notions et exercices nécessaires à la lutte contre la criminalité économique et à la formation de la conscience du magistrat et de l’avocat.

Pour conclure, la bonne santé de la justice congolaise passe par la volonté politique que devront partager toutes les institutions publiques pour commencer par une révolution législative et un programme de formation scientifique et morale des acteurs judiciaires.

La justice congolaise malade ne peut guérir que par la renaissance de l’Etat congolais, entrainant celle de la justice.

La Kombolisation est en marche.

Bamuangayi Kalukuimbi Ghislain

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Tél : +243 999 942 752

 

 

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