RDC : la realpolitik exige la tenue du dialogue national et rejette la rhétorique du Front Anti-dialogue

RDC : la realpolitik exige la tenue du dialogue national et rejette la rhétorique du Front Anti-dialogue

 (Par Professeur Florent Gabati)

La situation de la RDC aujourd’hui n’est pas sans analogie et présente des faisceaux graves d’un Etat dans un coma profond. Le plus important est hic et nunc de nous arrêter sur des postures avec des clivages qui font comme un écran de fumée à l’existence d’une réponse claire à la problématique de la grave crise existentielle de l’État congolais. Il faut revenir aux fondamentaux, aux leviers concrets qui demeurent des outils restaurant la paix. A fortiori nous devons souligner qu’il faut éviter d’alimenter une conception manichéenne : dialogue d’un côté, anti-dialogue de l’autre. La question centrale qui se pose est la suivante : dans le contexte géopolitique présent de la RDC, un pays menacé dans son existence, dans sa souveraineté, dans sa stabilité n’a-t-il pas le droit de prendre toutes les dispositions contre ces spectres dangereux en renouant le dialogue ? Dans la réalité politique, la logique que prônent ceux qui vont à contrario de la thèse des pourparlers soutenus par les Eglises catholique et protestante ne prime pas quand la guerre a commencé, la souveraineté s’est effacée impliquant la conformité de la loi fondamentale sur l’ensemble du pays. La guerre que vivent les congolais éclate les mœurs, les usages partagés par une communauté et provoque une scission dans la loi fondamentale du pays. Un gouvernement légal devient illégitime sans fondement politique et moral, sans levier juridique instituant les 25 provinces. Nul n’ignore que la légalité se définit donc comme la conformité avec la constitution, ni plus ni moins.

Dans cette perspective, la formule de Jean Jacques Rousseau est d’une résonance particulière sur notre pays qui n’en finit pas avec les bruits de bottes : « le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir ». Elle montre évidemment que la force ne fait pas droit. Pour autant, il faut admettre que le droit n’est rien sans la force. Qu’est-ce qu’en effet une constitution lorsque les armes crépitent ? Le rapport entre la force et le droit, la loi fondamentale en particulier, n’a dès lors rien de contre nature. A posteriori le chef de l’État reste le plus grand responsable aux manquements de ses devoirs de garant de la constitution en laissant certaines situations de graves crises se produire sans rien faire pour les prévenir. C’est dans cette optique il faut appréhender le paradigme de « Si vis pacem, para bellum ». Il implique qu’une nation doit être prête et suffisamment forte pour se défendre contre les menaces afin de préserver la paix et de dissuader les ennemis potentiels. Cette philosophie de la paix par la force trouve son origine dans l’Antiquité romaine et elle reste aujourd’hui pertinente pour maintenir la stabilité et la souveraineté. Maintes fois dans nos articles, nous avons décrié la médiocratie du régime actuel qui n’a jamais compris la quintessence de notre point de vue en travaillant dans l’optique du renforcement des capacités de toutes les forces sécuritaires en octroyant aux policiers, aux militaires des meilleurs salaires, des équipements adéquats comme le sont aujourd’hui les puissantes armées africaines. Au contraire les médiocres ont travaillé en somnambules, en recyclant les voleurs, les incompétents, en traquant les opposants au lieu de rassembler tous les congolais quelles que soient nos divergences. Il faut condamner tous les responsables aux manettes qui n’ont jamais compris que nous assistons à une fragilisation des relations internationales, car le monde devient plus antagonisé.

Certes depuis l’indépendance de la RDC, des dialogues se sont succédé. Si beaucoup d’observateurs sont unanimes sur leurs piètres résultats sur terrain, on doit néanmoins réfléchir sur la qualité de notre classe politique. Nous avons beau fixer des textes, des lois bien faits, qu’est-ce qu’il faut encore ? La culture des dialogues n’est pas un phénomène nouveau en RDC. D’ailleurs, en 2002, le prix de la paix est passé par le dialogue inter-congolais de Sun City en Afrique du Sud avec un schéma inédit au monde : 1 président avec 4 vice-présidents. Il ne faut pas que les congolais restent naïfs : quand on est face à une guerre et qu’on veut négocier certains objectifs, il y a le rapport de force qui compte pour les atteindre. Il y a deux solutions qui demeurent optimales : soit le dialogue, soit la force en imposant la paix. Dans la configuration actuelle, le pouvoir de Kinshasa a montré ses limites, de Bunagana à Goma il a connu un échec cuisant. La situation sur tous les territoires à l’est du pays échappe bel et bien au contrôle des médiocres qui sont aux manettes à Kinshasa. Il est temps d’arrêter avec des rhétoriques abracadabrantesques de l’anti-dialogue. Il faut savoir analyser les versions ontologiques et logiques des crises actuelles pour ne pas tomber dans des politiques du fantasme.

Le dialogue sous toutes ces formes est essentiel pour la résolution des conflits dans tous les pays du monde. Pourquoi dans cette grande guerre aux portes de l’Europe aujourd’hui, celle entre l’Ukraine et la Russie, tous les pays occidentaux membres de l’OTAN exigent le dialogue entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky ? C’est pour décider autour de la table des engagements concrets de sécurité et du cessez-le-feu. Souligner que le dialogue ne peut remplacer la sécurité demeure archi faux. Avec la force argumentaire, nous affirmons que le dialogue renforce la sécurité de l’État dans la promotion de la culture de la sécurité, il renforce la confiance citoyenne et quand il est mené de manière constructive, le dialogue demeure l’outil par excellence pour réinstaurer la souveraineté nationale annihilée par la guerre suite à la fracture politico-économique, sécuritaire et sociale avec 2 administrations dans le cadre de la RDC de nos jours. Somme toute, le dialogue permet de reconstruire les bases d’une paix durable, de renforcer la légitimité du pouvoir actuel érodée à l’est du pays. Pour empêcher des escalades et renforcer les relations entre les parties en conflits, c’est le dialogue qui est prôné et le président américain Donald Trump, plus pragmatique que ses prédécesseurs l’a bien compris en utilisant le realpolitik s’enracinant sur l’hyperpuissance mondiale des USA comme le faisait bien avant Henry Kissinger pour imposer la paix entre certains pays en conflits, à l’instar de l’Arménie et l’Azerbaïdjan, de la Thaïlande et le Cambodge.

La situation sécuritaire continue à se dégrader jusqu’à ces dernières heures à l’est du pays. Faut-il mobiliser les congolais contre le dialogue ? Faut-il sceller la partition du pays, en d’autres termes la balkanisation ou accepter la banalisation de la guerre dans notre pays avec deux administrations, deux armées ? Nous n’acceptons pas cette logique de ces loosers qui ne veulent pas de dialogue comme s’ils avaient des recettes miracles. La RDC ne veut plus de vendeurs d’illusions. Dans l’exercice de nos hautes fonctions et notre expérience internationale, nous avons participé aux différents accords de coopération et dialogues, c’est pourquoi nous sommes mieux placés pour souligner de la nécessité pour tous les leaders congolais sans exclusion de participer au dialogue. In fine, Il faut que les congolais comprennent que les acteurs politiques actuels demeurent comptables des échecs de différentes politiques ,de la menace de l’existence stricto sensu de l’État congolais .La problématique de la refondation de l’État congolais, de sa stabilité réside dans la qualité des hommes politiques , des acteurs qui ne doivent pas tisser l’immoralité, du cynisme politique. Les déficits des dirigeants actuels ne sont que des facteurs expliquant la persistance en RDC des conflits armés. Pour résoudre durablement la guerre, il faut primordialement une approche nationale autour d’un leadership fort avant de penser à d’autres mécanismes internationaux.

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