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RDC : Me Dieudonné Tshibuabua plaide pour la dépolitisation des établissement et entreprises publiques du Portefeuille

RDC : Me Dieudonné Tshibuabua plaide pour la dépolitisation des établissement et entreprises publiques du Portefeuille

 

Son constat est sombre. Et sa recommandation, pleine de lumière. Réfléchissant sur le sort de sa chère patrie, la RD. Congo, Me Dieudonné Tshibuabua Mbuyi s’attèle, dans sa énième tribune, sur l’épineuse question de la croissance et performance des établissements et entreprises publiques du Portefeuille. Dans sa réflexion, cet Avocat aux Barreaux de Kinshasa-Gombe, de Kananga et de Bruxelles épingle le constat pénible, en RDC, du choix porté sur des mandataires publics sans compétences managériales avérées, ni requises. Pour lui, la désignation des acteurs politiques aux fonctions de mandataires ne favorise pas la croissance, encore moins la performance des entreprises publiques. Ce, étant donné, que ces acteurs politiques portent l’écharde morale envers les intérêts de leur parrain, à savoir leurs partis politiques ou Autorités Morales. Pour juguler ce mal qui ronge l’arsenal du Portefeuille de l’Etat Congolais, il recommande, in extenso, le mode de recrutement de gestionnaires sur base d’un profil managérial avéré ou par un concours indépendant, avec un contrat de performance à la clé, dont les objectifs devront être réévalués périodiquement. Ainsi que l’annulation d’un des décrets de l’ancien Premier Ministre Jean Michel Sama Lukonde précité qui va à l’encontre de l’article 18 de la loi du 07 juillet 2008 qui organise les entreprises publiques.

 

La dépolitisation des établissements et entreprises publiques du portefeuille est une condition sine qua non à leur croissance et leur performance

Une entreprise publique est toute entreprise du portefeuille de l’Etat dans laquelle l’Etat ou toute autre personne morale de droit public détient la totalité́ ou la majorité́ absolue du capital social. La loi du 07 juillet 2008 a procédé à la transformation des entreprises publiques du portefeuille de l’Etat en sociétés commerciales. Ces entreprises publiques du portefeuille de l’Etat sont régies par le droit commun et prennent l’une des formes prévues par le Décret du 27 février 1887 sur les sociétés commerciales. Les représentants de l’Etat dans les entreprises du portefeuille sont des mandataires publics et ceux-ci forment le conseil d’administration.

Parmi ces mandataires, il y en a que l’on qualifie de mandataires actifs dont le Directeur Général (DG) et dans une moindre mesure, son adjoint. Il y a également les administrateurs, avec le Président du Conseil d’Administration (PCA) en tête, qui sont des mandataires passifs.

Etant donné que ces entreprises sont transformées en sociétés commerciales, elles se retrouvent dans un marché concurrentiel, vu la libéralisation de notre économie, et elles sont régies par le droit OHADA.

Ces entreprises mènent des activités lucratives et se doivent d’être performantes. D’où la nécessité de placer à la tête de ces entreprises, qui pour certaines, ont la taille des multinationales, des personnes ayant un profil de bons managers ainsi que des comités de gestion performants.

Le triste constat est qu’en RDC, la gestion de la plupart de ces entreprises est confiée à des mandataires n’ayant pas les compétences managériales avérées et requises. A la place, c’est un partage de gâteau entre politiciens ou partis politique, dans le cadre d’une récompense pour loyauté ou fidélité à un groupement ou à une certaine autorité morale.

Nous ne contestons pas le fait que certains politiciens peuvent aussi être des bons managers, mais la dette morale dont la plupart se sentent liées les amène à travailler non pas dans l’intérêt de la croissance et de la performance de l’entreprise et par ricochet de l’Etat, mais plutôt pour l’intérêt de leur parti politique ou leur autorité morale. Ainsi, la majorité des entreprises publiques deviennent des lieux de recrutement et d’embauche des membres des partis politiques, des membres de famille des mandataires, ou des personnes qui ont été recommandé au détriment du mode de recrutement classique et utile basé sur les besoins de l’entreprise.

La majorité de ces entreprises sont moins performantes, puisque la masse salariale absorbe tous les bénéfices et que le management s’effectue de manière hasardeuse.

Dans l’intérêt du pays, il est grand temps de mettre un terme à ce système et de privilégier les compétences et la méritocratie. Il y a des personnes qui possèdent des compétences avérées, mais qui, faute de soutien politique, ne peuvent pas accéder à la gestion de ces entreprises.

Par ailleurs, les conseils d’administration de la plupart de ces entreprises sont fortement politisées, avec comme conséquence des rivalités entre les membres du conseil d’administration dont la plupart aboutissent à une guerre acharnée entre le Directeur Générale ( DG) et le Directeur Générale Adjoint, qui souvent convoite la place du DG, ou encore une guerre ouverte entre le DG et le Président du Conseil d’Administration ( PCA), qui oublie son rôle passif et veut supplanter le DG, dans la gestion quotidienne. Il n’est pas rare de voir que le DG, par représailles, bloque à son tour, les avantages des membres du conseil d’administration avec toutes les conséquences sociales qui s’en suivent…Dans une telle situation, il est illusoire de penser que ces entreprises peuvent être performantes.

A cela, il faut rajouter deux décrets de l’ancien Premier Ministre Sama Lukonde signés le 12 avril 2023 portant sur les avantages des mandataires publics dans les entreprises de l’État qui octroient aux mandataires non actifs (passifs) une rémunération régulière, au mépris de l’article 18 de la loi du 07 juillet 2008 qui organise les entreprises publiques, et qui par contre fixe leurs avantages en jeton de présence pour participation aux réunions du conseil d’administration. Par ailleurs, ces décrets leur accordent également d’autres avantages tels que : des soins médicaux, des frais funéraires, des frais d’installation représentant six  mois de rémunération, des indemnités de sortie représentant 6 mois de rémunération, des frais de mission et des droits au remboursement des dépenses engagées et billets pour des voyages effectués dans l’intérêt des entreprises, avec comme conséquence que certaines de ces entreprises déboursent des centaines des milliers de dollars mensuels juste pour la rémunération des mandataires, alors que les employés souffrent de grands retards de paiement.

Nous proposons que désormais, le mode de recrutement de gestionnaires se fasse sur la base de leur profil managérial avéré ou par un concours indépendant, avec un contrat de performance à la clé, dont les objectifs devront être réévalués périodiquement. Par ailleurs, nous recommandons l’annulation du décret de l’ancien premier ministre précité qui va à l’encontre de l’article 18 de la loi précitée et d’octroyer uniquement des jetons de présence de participation aux mandataires passifs.

Sous l’œil du Ministre de tutelle et de différents organes de contrôle, tout gestionnaire qui n’aurait pas rempli ces obligations managériales devrait être remercié et remplacé. Ainsi, nous pourrions sauver toutes ces entreprises publiques de cet état de quasi- faillite dont se retrouve la plupart d’entre elles, et, les rendre performantes dans un marché concurrentiel largement dominé par les entreprises à capitaux étrangers, ce qui permettrait certainement d’atteindre au moins un des piliers de l’action gouvernementale, à savoir, la création et la préservation d’emploi stable.

Me Dieudonné Tshibuauba Mbuyi

Avocat aux Barreaux de Kinshasa-Gombe, de Kananga et de Bruxelles

Vice-Président du Centre de Recherche et d’Information pour la Protection des Consommateurs en RDC

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